"Jusqu'ici, les crues arrivaient surtout en fin d'été en Valais", souligne un hydrologue
Contrairement aux Grisons, les intempéries n'ont pas fait de victimes vendredi et samedi en Valais. Mais on a frôlé la catastrophe dans les vallées de Zermatt, d'Anniviers ou dans le val d'Hérens. Ce sont les cours d'eau de ces vallées latérales qui ont causé le plus de dégâts, avant de se déverser dans le Rhône.
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Ce type de danger n'est pourtant pas sous-estimé dans le canton, note Frédéric Jordan, directeur du bureau d'expertise Hydrique Ingénieurs. "Mais les événements du week-end nous rappellent que le risque existe toujours en région montagneuse, avec des grands bassins versants, les phénomènes peuvent arriver rapidement et être plus violents qu'en plaine", souligne-t-il.
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Le réchauffement, un facteur de risque
Ce sont des phénomènes qui se développent en "quelques heures", précise-t-il. "On savait depuis plusieurs jours que des précipitations étaient attendues, mais on ne sait jamais où vont arriver les cellules orageuses et quelle sera leur ampleur réelle." La forte quantité de neige tombée cet hiver a aussi aggravé la situation.
De telles crues ne sont pas inhabituelles en Valais mais la période est atypique. "Dans la dernière centaine d'années, les fortes crues sont arrivées typiquement entre août et octobre. Or, si on regarde ces 12 derniers mois, on a eu une crue du Rhône importante le 14 novembre 2023 et le 21 juin 2024, ce qui est assez nouveau", explique le spécialiste.
Selon lui, cela est "fort probablement" lié au changement climatique, car les températures élevées sont un facteur aggravant les risques. "À Zermatt, il a fait 14 degrés vendredi pendant les précipitations. C'est plus chaud qu'en août 1987 ou en octobre 2000, lors des dernières grandes crues du Rhône", souligne-t-il.
Miser sur les barrages
Face à ces mutations, "le maître-mot pour la Suisse, c'est l'adaptation", prévient Frédéric Jordan. "Le dispositif mis en place ces 30 dernières années se base sur l'aménagement du territoire et les cartes de danger, dont certaines ont été établies il y a 20 ou 30 ans. Il y a des communes dans lesquelles les cartes sont anciennes et d'autres où elles sont récentes. Évidemment, chaque fois qu'un événement comme ça arrive, ça stimule l'envie d'investir et de réétudier ces phénomènes pour réduire les risques localement", dit-il.
Autre investissement utile: les barrages qui permettent de limiter les dégâts. À l'analyse, ils ont réduit le débit du Rhône d'environ 300 m3/seconde ce week-end, avance l'hydrologue. "C'est extrêmement important, puisque le fleuve a atteint plus de 1000 m3/seconde à la Porte-du-Scex (Vouvry). Pour le Rhône, c'est énorme!"
Ces barrages ont été d'autant plus efficaces qu'en juin, ils ne sont pas pleins. Ils auraient donc leur importance dans le futur dispositif de prévention. Pour l'hydrologue, "un projet comme le barrage hydroélectrique du Gornerli permettrait de retenir jusqu'à 70 m3/seconde en amont de Zermatt dans le cas d'un événement comme celui de vendredi".
Propos recueillis par Valérie Hauert/jop