Depuis 10 ans, les tribunaux alertent sur l'inexistence de place en milieu fermé pour des détenus souffrant de troubles psychiatriques. Dans leur rapport annuel 2023, ils ont voulu envoyer un message au gouvernement et au Parlement: "Un jour, il n'est pas exclu qu'il faille rendre la liberté à des individus dangereux jamais soignés et qui représentent un risque sérieux pour la sécurité de la population", est-il écrit.
Alors que le nombre de condamnés à des mesures thérapeutiques institutionnelles augmente, il n'existe aucun établissement fermé approprié en Valais. Il faut donc chercher dans les autres cantons, où les places manquent également. En attendant, les individus qui ont commis un acte illicite en raison de leurs troubles psychiatriques sont incarcérés en prison préventive.
Détention préventive illicite
La jurisprudence tolère la détention préventive, mais généralement pas plus de 8 mois. Ensuite, cette détention devient illicite car elle ne respecte pas le principe de proportionnalité et les droits fondamentaux des détenus.
Le Valais doit alors les indemniser. Entre 2018 et 2021, six cas pour un montant de près de 95'000 francs ont été recensés. Début 2023, un individu qualifié de "non dangereux" a dû être libéré, a confié à la RTS le Tribunal d'application des peines et des mesures. Des détenus ayant commis des infractions plus graves pourraient donc être relâchés, alerte-t-il aujourd'hui.
Dans les autres cantons romands, il n'y a plus aucun cas similaire. Le dernier date de trois ans à Genève, où le canton a dû payer 15'500 francs à un détenu.
Interpellation urgente
De nombreux députés valaisans s'inquiètent du manque de réaction du canton. Après la parution du rapport des tribunaux, trois députés au Grand Conseil vont déposer une interpellation urgente cette semaine lors de la session, a appris la RTS.
Ils veulent faire le point sur la création d'un nouveau centre thérapeutique semi-privé. Un projet avait été présenté en 2019.
Emilien Verdon/lan
"On ne peut pas tout faire en même temps", dit Frédéric Favre
Interrogé lundi dans l'émission Forum, Frédéric Favre, conseiller d'Etat valaisan en charge de la Sécurité, est revenu sur le manque de lieux de détention pour les détenus qui ont besoin de soins psychiatriques. "C'est un constat identifié depuis des années, mais cela prend du temps", a-t-il réagi. "Cela dépend aussi des budgets que nous avons à disposition, des décisions du Parlement par rapport à des nouvelles constructions."
Cette problématique du manque de place en prison se retrouve également au niveau des mineurs et des jeunes adultes. Mais "on ne peut pas tout faire en même temps", s'est défendu Frédéric Favre.
Quant à la possibilité que les juges relâchent des détenus, il souligne que "c'est de leur responsabilité en fonction de la pesée d'intérêts".