Le Grand Conseil valaisan réuni en session extraordinaire sur le dossier des crues du Rhône
Une commission d'enquête parlementaire (CEP) devra se pencher sur l'enlisement du dossier ayant empêché la mise en œuvre des travaux de correction du Rhône à Sierre-Chippis. Le Grand Conseil l'a décidé à l'unanimité, estimant qu'il était essentiel de comprendre pourquoi la mesure, pourtant identifiée comme prioritaire, n'a jamais vu le jour alors qu'elle avait été approuvée par le Grand Conseil en 2008.
Deux résolutions issues des rangs du Centre, du PLR, de l'UDC, du PS et des Vert-e-s souhaitaient ainsi répondre à un "besoin de transparence" et clarifier les responsabilités. La CEP devra notamment établir qui sont les acteurs (politiques, administratifs, techniques, publics ou privés) qui ont contribué à ce retard ou à cet abandon, et s'il y a eu des défaillances institutionnelles.
Prêts garantis aux entreprises
Par ailleurs, l'Etat du Valais pourrait cautionner des prêts pouvant atteindre 100 millions pour aider les entreprises touchées par le débordement du Rhône en juin dernier dans le secteur de Sierre-Chippis. Par 117 voix contre 10, le législatif cantonal est entré en matière mercredi sur un décret allant dans ce sens. Le détail sera débattu lors de la session de novembre.
Si les groupes se sont accordés sur l'importance de ce dispositif, demandé par le fabricant d'aluminium Novelis, plusieurs propositions d'amendements ont d'ores et déjà été annoncées. Tous les groupes sont entrés en matière, sauf les Vert-e-s qui ne s'opposaient pas au décret mais regrettaient que les délais légaux n'aient pas été respectés pour l'ajouter à l'ordre du jour.
Via ce décret, limité dans le temps, le Conseil d'Etat propose un soutien sous forme de prêts. Le cautionnement sert à couvrir la période durant laquelle les liquidités font défaut, en raison des démarches à entreprendre auprès des assurances jusqu’à l’obtention des dédommagements, a expliqué Christophe Darbellay, en charge de l'économie.
Il a appelé le Parlement à "sauver la maison" pour que l'activité reprenne, que les PME valaisannes en lien avec Novelis puissent être payées et que la confiance des acheteurs, des groupes comme Porsche et Land Rover, revienne sur le site. "Les premiers signaux sont positifs", a-t-il fait savoir.
Le directeur du site Novelis à Sierre, Serge Gaudin salue cette décision, après avoir réclamé en août dernier une aide financière directe.
Dans La Matinale, il ajoute que l'entreprise fait face à 80-100 millions de charges liées au débordement du Rhône. Le montant de prêt permettra à l'entreprise de faire face à ces coûts "qui vont freiner le développement de l'activité sur Sierre en termes d'investissement de futur". Pour ce faire, "Nous espérons une aide de l'Etat, déjà sous forme d'un crédit relais, des aides directes seraient encore mieux", ajoute-t-il.
Des questions ouvertes
Le décret préparé par le Conseil d'Etat propose également de prendre en charge les intérêts de ces prêts, estimés à environ 3 millions de francs. Ce point a rencontré plusieurs critiques, notamment du PLR estimant qu'il s'apparentait à une "reconnaissance de responsabilité". Une critique balayée par Christophe Darbellay.
La mise en place ou non de sanctions en cas de non-respect des termes du décret doit encore être discutée, de même que celle des firmes qui pourraient prétendre à cette aide, ou encore des conditions à respecter liées au maintien des emplois en Valais.
Aide d'urgence liée au limon
Le Parlement cantonal a aussi largement accepté un postulat interpartis portés par des élus du district de Sierre qui demande au Conseil d'Etat de débloquer une aide immédiate d'urgence d'au minimum 4 millions de francs pour débarrasser le limon apporté par le Rhône, qui engendre de la poussière désagréable et pénètre partout.
Les assurances ne prennent en charge que le déblaiement un mètre autour de la maison. Le reste de la parcelle est à la charge des habitants, déplorent les signataires issus du Centre, de l'UDC, des Vert-e-s et du PLR. "Un propriétaire a reçu un devis de l'ordre de 40'000 francs pour remettre en état sa parcelle de quelque 600 m2", illustrent-ils.
Fonds d'aide aux victimes rejeté
En revanche, le Grand Conseil a refusé par 69 voix contre 59 un autre postulat interpartis demandant la création d'un Fonds cantonal d'aide aux victimes, qui avait pour but d'aider les ménages, les entreprises et les collectivités publiques. "Il est du devoir de notre canton de soutenir les victimes de cette catastrophe naturelle", estimaient les signataires du texte issus des rangs du PS, du PLR, du Centre et de l'UDC.
Pour le Conseil d'Etat, des mécanismes d'indemnisation des dommages pour les particuliers existent déjà. "Il faut d'abord utiliser tous les outils de soutien avant d'en créer de nouveaux", a répondu le conseiller d'Etat Roberto Schmidt.
Actuellement, il est possible de recourir aux assurances, au Fonds suisse de secours pour les dommages non assurables ainsi qu'à l'aide des organismes, comme la Chaîne du Bonheur, la Croix-Rouge ou Caritas, a-t-il listé. Les entreprises peuvent, elles, recourir aux RHT ou aux prêts octroyés par le Centre de cautionnement et de financement (CCF). "Si à la fin, certains dégâts ne sont toujours pas couverts, que des situations extrêmes devaient subsister, alors on pourra en reparler", a-t-il martelé.
ats/fgn/jop
La sécurisation du Rhône à Sierre-Chippis: un dossier embourbé
Considérés comme prioritaires depuis plus de vingt ans, les travaux de sécurisation du Rhône dans le secteur Sierre - Chippis n'ont jamais été réalisés. Un enlisement qui a suscité de nombreuses questions mercredi lors de la session spéciale du Grand Conseil valaisan.
Les communes de Sierre et Chippis ont particulièrement souffert des inondations survenues en juin dernier. Le secteur était pourtant considéré depuis le début des années 2000 comme prioritaire, car particulièrement vulnérable face aux crues du Rhône, au même titre notamment que Viège.
Les deux projets ont été mis à l'enquête publique en 2008. Mais alors que le secteur de Viège "était déjà largement terminé en juin 2024, malgré la complexité et les problèmes rencontrés", celui de Sierre-Chippis n'avait "pas quitté la ligne de départ"; comment l'expliquer, s'est interrogé le PLR. Le canton a répondu par écrit à cette question et à une dizaine d'autres interpellations venues de tous les bords politiques.