Le manque de préparation pointé du doigt par les guides après une série noire au Cervin
Chaque saison, 2500 alpinistes gravissent le Cervin. Plus de 500 personnes y sont décédées depuis la première ascension en 1865. Ces dernières semaines, sept alpinistes y ont perdu la vie, dont un Autrichien de 36 ans, le 23 août dernier, et une Canadienne de 49 ans le 25 juillet. Il faut remonter à 2019 pour trouver pareille série noire.
Au total, depuis le début de l'année, plus d'une quarantaine de personnes sont décédées sur les sommets de Suisse, soit autant qu'en 2023. Jeudi, deux alpinistes suisses de 55 et 54 ans ont encore perdu la vie au Lagginhorn (VS).
Sämy Aufdenblatten, président de Zermatters, qui regroupent notamment des guides de montagne, pointe un manque de connaissances et de préparation.
"On voit beaucoup de vidéos de personnes qui grimpent le Cervin. Mais si tu n'as pas l'éducation, le physique ou l'entraînement, c'est vite dangereux, surtout quand les gens décident d'y aller seuls", prévient Sämy Aufdenblatten dans le 19h30.
Prendre le temps de s'acclimater
Pascal Gaspoz, chef du Groupe Montagne à la Police cantonale valaisanne, renchérit dans La Matinale: "Les difficultés techniques lorsqu'on est en pleine forme ne sont pas forcément très élevées. Mais, par contre, dès qu'on est un petit peu fatigué avec l'altitude, avec potentiellement des conditions météo qui peuvent varier, ça devient vite problématique."
"Ce qu'on peut recommander aux personnes, c'est de prendre le temps de gravir cette montagne, de potentiellement s'acclimater sur un autre sommet préalablement. Et puis, dans tous les cas de figure, être accompagné par un professionnel", conseille encore Pascal Gaspoz.
Dépit des sauveteurs
Du côté des sauveteurs, cette méconnaissance et ce comportement suscitent parfois une pointe de dépit. "On est des sauveteurs, on n'est pas des juges. Mais même si tu travailles comme guide et que tu donnes des conseils là-haut, par exemple de faire demi-tour à cause de la météo, ils rigolent. Alors, on laisse tomber", regrette dans le 19h30 Anjan Truffer, guide et chef des secours chez Air Zermatt.
De quoi songer à obliger les alpinistes à être accompagnés de guides pour l’ascension du Cervin. "C'est un rêve, on parle de ça depuis la première ascension. Mais en Suisse, ce n'est pas possible, déjà légalement — la montagne est ouverte pour tout le monde — et ce serait très difficile à contrôler."
Sujet TV: Erwan Jagut, Cédric Jordan
Propos radio recueillis par Emilien Verdon
Version web: Antoine Schaub