Début 2018, le canton de Vaud découvrait avec stupeur que dans le nord-vaudois, un père avait pu pendant des années maltraiter ses huit enfants et abuser de certains d'entre eux, alors que la famille était suivie par les services sociaux.
L'affaire a eu l'effet d'un électrochoc et entraîné une profonde remise en question du système. Fin septembre, l'ancien juge Claude Rouiller a rendu un rapport sévère sur les dysfonctionnements qui ont entouré l'affaire et émis des recommandations pour éviter qu'un tel drame ne se reproduise.
Dans la foulée, l'Etat a annoncé un plan d'action. Le chef du Service de protection de la jeunesse (SPJ) et la responsable de l'Office régional du Nord-Vaudois ont été limogés.
Une commission interdisciplinaire d'éthique et de protection (CIEP), présidée par le spécialiste des droits de l'enfant Jean Zermatten et composée de cinq professionnels de divers profils, a aussi été nommée pour aider le SPJ à gérer les cas les plus sensibles.
Recrutement du nouveau chef en cours
Six mois après la parution du rapport Rouiller, une profonde mutation est engagée au Service de Protection de la jeunesse et à la justice de paix.
Le recrutement, très attendu, du nouveau chef du SPJ est toujours en cours mais devrait, selon les informations de la RTS, intervenir prochainement.
Vers des Chambres de la protection de l'enfant
Dans ses conclusions, Claude Rouiller recommandait la création de juges pour mineurs. Après avoir étudié la question, le Tribunal cantonal propose de créer des Chambres de la protection de l'enfant uniques en Suisse, a appris la RTS.
Le président du Tribunal cantonal Eric Kaltenrieder estime que cette proposition va encore plus loin que la recommandation de l'ancien juge Rouiller.
Dans ces Chambres, des juges et des assesseurs seraient formés spécifiquement aux questions liées aux mineurs mais, en raison de la lourdeur de la tâche, ils traiteraient aussi d'autres dossiers.
Le projet est en cours et a été discuté la semaine dernière avec une délégation du Conseil d'Etat. Il impliquera des moyens supplémentaires et pourrait se concrétiser d'ici l'été 2020.
Quant à la CIEP, au coeur de la réforme, elle s'est réunie trois fois à ce jour et devrait se rencontrer tous les mois. Elle s'est penchée à ce stade sur une dizaine de cas, souvent des situations où la question du placement d'un enfant fait débat.
Pression sur les travailleurs sociaux
Si les réformes avancent, la gravité de l'affaire a eu un impact sur les employés des services sociaux. La peur qu'un tel drame puisse se reproduire a gagné le service.
D'après Jacques Cornu, directeur adjoint de foyers d'accueil d'urgence pour jeunes dans le canton, la pression est plus forte sur les assistants sociaux et par conséquent sur les équipes éducatives.
Un sentiment prédomine: celui que, par prudence, on tendrait à sortir plus facilement les enfants de leurs familles pour les placer.
Demandes de prise en charge d'urgence en hausse
Si on regarde les chiffres, pas de forte augmentation: 1063 enfants ont été placés l'an dernier, soit 9 de plus qu'en 2017.
Mais les demandes de prise en charge dans les foyers d'urgence, elles, ont nettement progressé. Elles ont doublé en cinq ans et augmenté de 30% rien qu'entre 2017 et 2018 pour s'établir à 800. Il y a aujourd’hui saturation en terme de places d’accueil.
Sujet radio: Tania Barril
Adaptation web: Pauline Turuban