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Matches de foot et hôtels gratuits pour les politiciens vaudois

Sport et politique : le top des invitations les plus généreuses
Sport et politique : le top des invitations les plus généreuses / Mise au point / 2 min. / le 26 mai 2019
Qui n'a jamais rêvé de places pour la finale de la Champions League et une nuit d'hôtel 5 étoiles pour deux? C'est le type d'invitations offertes régulièrement à des politiciens vaudois par les associations sportives internationales. Ces invitations officielles sont un devoir et une obligation de représentation selon les autorités vaudoises. Mise au Point a mené l'enquête.

Il n'y a pas de prix pour voir Lionel Messi et ses co-équipiers remporter la Champions League. En 2015 à Berlin, la finale Barcelone – Juventus s'est terminée par un 3 à 1 en faveur de l'équipe espagnole. Le conseiller d'Etat en charge des sports Philippe Leuba ainsi que le ministre des Finances Pascal Broulis et son fils sont dans le public. Ils ont pu assister au match gratuitement.

Ils ont été invités par l'UEFA (Union des associations européennes de football) qui propose les billets et l'hôtel Ritz-Carlton 5 étoiles gratuitement, selon les documents "Football Leaks" du Spiegel partagés avec le consortium européen de journalistes d'investigation (EIC), dont la RTS est membre.

Hôtel 5 étoiles

La chancellerie de l'Etat de Vaud justifie ces invitations. "Notre canton héberge 59 fédérations internationales, il est le canton siège du CIO et de l'UEFA notamment, et cela oblige donc les autorités à un véritable devoir d'accueil et d'accompagnement. (…) Parmi les obligations issues de ce devoir, il y a celui d'honorer les invitations de ces organisations."

Dans les "Football Leaks", les exemples de ces obligations ne manquent pas. Les politiciens vaudois ont le sens du devoir. En 2013, l'UEFA a offert le pack hôtel Marriott et finale de la Champions League à la conseillère d'Etat vaudoise Jacqueline de Quattro. Le prix de la chambre d'hôtel "Deluxe room" est de 327 euros, alors que les billets du match sont d'une valeur de plusieurs centaines d'euros.

En 2016, ce sont le conseiller d'Etat Pascal Broulis et le chancelier de l'Etat de Vaud Vincent Grandjean qui profitent d'une invitation à la demi-finale de l'Euro foot, cette fois-ci, sans l'hôtel.

Pour l'UEFA, qui a son siège à Nyon, "il est usuel d'inviter des personnes sélectionnées pour assister à des matchs, dans le but d'échanger des points de vue, d'entretenir des relations cordiales et de maintenir le dialogue, le tout dans un cadre informel."

Les billets à choix

Les conseillers d'Etat Pascal Broulis et Philippe Leuba se sont également rendus en Espagne pour la Coupe du monde de basket en 2014, invités par la Fédération internationale de basket basée dans le canton (FIBA).

Les politiciens vaudois se retrouvent également aux grands événements du CIO. Aux Jeux olympiques, les voyages sont généralement médiatisés et les rencontres officielles sont nombreuses. Selon la chancellerie vaudoise, le CIO est moins généreux que l'UEFA: "Les invitations officielles (de l'UEFA) comportent le transport en avion et l'hébergement, le CIO quant à lui prend en charge l'hébergement".

Les petites fédérations sont moins généreuses, et surtout elles attirent moins de politiciens. Pour le tir à l'arc et le volley, les fédérations affirment ne pas envoyer des invitations aux politiciens vaudois.

Cadeau ou devoir

Pour Alberto Mocchi, président des Verts vaudois, ces invitations posent problème: "La frontière entre le devoir de représentation et le cadeau est problématique avec ce type d'invitations. J'ai de la peine à voir l'intérêt pour le canton d'envoyer un conseiller d'Etat et un membre de sa famille en Allemagne voir une finale de Champions League. Au fond, c'est toujours le même risque avec ce type de cadeau, celui d'être influencé et de perdre notre autonomie face à ces organisations internationales."

Ces invitations officielles dépassent la barre des 300 francs que le canton de Vaud s'est fixée comme limite des dons et avantages qu'un membre de l'exécutif peut recevoir. La Chancellerie d'Etat rétorque que ces événements font partie des obligations de représentation du canton. "Ce serait une fâcheuse confusion que d'associer a priori ces invitations à des avantages. (…) les invitations sont conformes aux pratiques en cours et admises de par le monde".

François Ruchti avec Marc Renfer, Dimitri Zufferey et Cécile Tran-Tien

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