Le 7 mars puis éventuellement le 28 mars pour un second tour, 298 des 300 communes vaudoises sont appelées aux urnes. Les communes récemment fusionnées de Oron/Essertes et de Blonay/St-Légier-La Chiesaz le feront plus tard.
Au total, 1574 sièges aux municipalités et 8063 sièges dans les conseils communaux sont en jeu. Le scrutin se prolongera les 25 avril et 16 mai avec respectivement les premier et deuxième tours des élections des syndics.
En temps de Covid, ce scrutin sera forcément particulier, les bains de foule étant remplacés par des actions sur les réseaux sociaux. Dans ce contexte. il est difficile pour des candidats moins connus d'exister. Et alors que plusieurs politiciens expérimentés, notamment les syndics Frédéric Borloz à Aigle, Laurent Wehrli à Montreux, se retirent, le défi de la relève est important dans le canton (voir encadrés).
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Les Vert'libéraux en embuscade
Après la vague verte qui a déferlé sur la Suisse à l'issue des votations fédérales de 2019, celle-ci pourrait bien s'abattre aussi sur ces communales vaudoises. Politologues et experts s'attendent à une progression des Verts à Lausanne comme ailleurs dans le canton et à un probable recul de l'UDC, surtout dans les villes.
Une montée en puissance des Vert'libéraux n'est pas impossible, concurrençant potentiellement Verts et PLR, selon eux. Un autre des enjeux étant justement de savoir si les PLR arriveront à couper l'herbe sous les pieds des Vert'libéraux. Il sera aussi intéressant de voir si les Verts et le PS progresseront ensemble ou pas.
Les politologues observent par ailleurs un "verdissement" de l'agenda politique des partis de droite, sauf pour l'UDC. Dans les grandes villes, les enjeux climatiques et énergétiques dominent en effet souvent les programmes et débats politiques.
Mais la crise du Covid-19 est venue bousculer ces thèmes en vogue. La gestion de la crise sanitaire et l'état de l'économie font également partie des préoccupations. A l'échelon des plus petites communes, la répartition de la facture sociale occupe les esprits.
Lausanne en ligne de mire
Surfant sur leur vague, les Verts se montrent particulièrement ambitieux. Ils n'ont jamais présenté autant de candidats à des élections communales, doublant leur nombre par rapport à 2016 pour les exécutifs et avec une augmentation de 60% pour les législatifs.
Le scrutin dans la capitale vaudoise est emblématique de cette gourmandise et attire toute l'attention. Les Verts ont provoqué un mini-séisme politique en brisant la "formule magique" rose-rouge-verte de la Municipalité lausannoise, avec le lancement de trois candidats dans la course au premier tour, sur une liste séparée: la sortante Natacha Litzistorf (environnement), aux côtés de deux nouveaux, Daniel Dubas et Xavier Company.
PS et POP se retrouveront donc seuls sur le ticket de la gauche plurielle, avec les sortants socialistes Grégoire Junod (syndic), Florence Germond (finances) et une nouvelle venue, Emilie Moeschler, ainsi que le popiste David Payot (écoles). Si la gauche va rester majoritaire, la réélection de ce dernier et le pari des Verts de placer un troisième élu seront l'un des enjeux du scrutin.
A droite, le PLR sortant Pierre-Antoine Hildbrand (économie) devrait facilement retrouver son fauteuil. Mais le parti espère décrocher un deuxième siège: il a pour ce faire choisi une femme, la députée Florence Bettschart-Narbel. Ce léger rééquilibrage à droite est la deuxième inconnue dans la capitale. Au total, 26 candidats briguent un siège à la Municipalité.
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Des scrutins animés à Yverdon et Vevey
Les regards seront aussi fixés sur Yverdon-les-Bains, deuxième ville du canton, où la campagne risque d'être animée. La gauche ambitionne de reprendre la majorité à la Municipalité, perdue fin 2014. Elle présentera un ticket rose-vert à cinq (3 PS et 2 Verts). Sauf qu'en face, la droite vise, elle, carrément six des sept sièges en lançant une liste commune avec quatre PLR, un Vert'libéral et un UDC.
Mais c'est sans aucun doute à l'exécutif de Vevey que les cartes seront les plus rebattues, après une législature très chahutée, entre tensions internes, suspensions et réintégration de municipaux. Pas moins de 29 candidates et candidats, répartis sur 11 listes, sont en lice pour obtenir l'un des sept sièges (cinq jusqu'ici). Ejectée l'été dernier lors d'une complémentaire, la droite tentera d'y retrouver sa place.
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A Montreux, c'est le poste de syndic qui attirera l'attention. Après 20 ans passés à l'exécutif de la Ville, le PLR Laurent Wehrli ne se représente pas. Quatorze personnes sont sur les rangs. A Nyon, le score du syndic et patron du Paléo Daniel Rosselat sera très suivi alors qu'il rempile pour un mandat. En tout, 17 candidats se lancent.
nr/boi/jr avec ats
Une campagne au goût de Covid
La campagne des élections communales de 2020 a un goût particulier. Les candidats évitent les serrages de mains et les bains de foule, mais ils sont tout de même présents physiquement là où c'est encore possible, au marché ou dans la rue, par exemple, mais sans effrayer l'électeur. Ou ils préfèrent les boîtes au lettres, les téléphones ou les réseaux sociaux.
En temps de coronavirus, il faut donc se réinventer pour exister. Dans ce contexte, les figures connues et les sortants pourraient tirer leur épingle du jeu. "Le risque est d'avoir une confirmation des personnes qui sont en vue et peu de chance pour de nouveaux venus de s'imposer à part s'ils bénéficient de réseaux particuliers et intenses", explique le politologue à l’Université de Lausanne René Knüsel dans La Matinale.
La présidente du Parti socialiste vaudois Jessica Jaccoud partage cette analyse. Selon elle, bénéficier d'un solide réseau personnel et professionnel sera déterminant. "L'électeur n'a pas beaucoup d'autres sources d'information que celle qu'il connaît. C'est-à-dire les gens qu'il a l'occasion de voir, qu'il a déjà vu et les sortants", analyse René Knüsel.
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Le défi de la relève
Ces élections communales constituent aussi un défi pour la relève du canton de Vaud. En effet, certaines figures se retirent après parfois plus de 20 ans à la municipalité et plus de 10 ans comme syndics. Il s'agit notamment des PLR Frédéric Borloz à Aigle, Laurent Wehrli à Montreux ou Pierre Rochat à Bex.
Pour leur parti, le défi sera de ne pas perdre ces trônes. Et la solution réside peut-être dans la limitation de la durée des mandats. Le PLR lausannois a déjà sauté le pas et un projet est sur la table du parti cantonal. Son président Marc-Olivier Buffat estime que chaque section locale devrait y réfléchir afin de soigner sa relève.
Avoir de fortes personnalités, longtemps en place, peut décourager les viennent ensuite, selon le politologue de l'Université de Lausanne, René Knüsel. La relève se prépare sur le long terme.
Huit communes vaudoises craignent même de se retrouver avec des sièges vides, au conseil communal et à la municipalité. A Givrins par exemple, la liste pour le conseil communal est trop courte de 16 candidats.
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Pour René Knüsel, "La pandémie est peut-être une occasion de se poser des questions: comment s'organise une campagne? Comment recrutons-nous? La crise aura au moins l'avantage de mettre en avant la difficulté de la relève."