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Rencontré sur Tinder, "il m'a forcé à faire des choses que je ne voulais pas"

FRIGO TINDER WEB
Le document: rencontres en ligne, quand la séduction laisse place à l'agression / L'actu en vidéo / 4 min. / le 15 décembre 2021
Trois jeunes femmes disent avoir été victimes d'agressions sexuelles par un homme rencontré sur l'application Tinder dans le canton de Vaud. Elles ont accepté de témoigner anonymement devant les caméras de la RTS.

Ces trois femmes ont entre 20 et 24 ans et ne s'étaient jamais rencontrées auparavant. Elles déclarent avoir été toutes victimes du même homme, rencontré en ligne sur l'application Tinder. Pour l'une d'entre elles, les faits remontent à près de dix ans. Pendant leur première rencontre à Lausanne, ils discutent et s'embrassent, puis le rendez-vous aurait dérapé.

"Au départ j'étais consentante, mais ensuite il m'a forcé à faire des choses que je ne voulais pas, raconte la première femme. A 15 ans, on ne se rend pas compte. Il m'a mis la main dans son slip et à aucun moment il ne s'est demandé si c'était ok."

>> Ecouter les trois témoignages :

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Témoignages de trois jeunes femmes qui déclarent avoir été victimes d’un homme rencontré sur l'application Tinder dans le canton de Vaud / L'actu en vidéo / 19 min. / le 3 mai 2021

Un procédé similaire

Sur son profil, cet homme dit être photographe. C'est par cette façon qu'il rencontre la deuxième femme. Selon elle, il lui propose de faire un shooting photo, d'abord à l'extérieur, puis demande à terminer la séance chez lui, ce qu'elle accepte.

"Il faisait ses photos, puis il s'est mis subitement à m'embrasser. J'avais son poids qui s'étalait sur moi, j'étais en position de faiblesse", témoigne la victime, ajoutant que l'homme l'aurait maintenu de force contre le lit. L'homme reçoit ensuite un appel de son ex-copine et demande à la jeune femme de partir, un scénario qu'il répéterait à chaque fois, pratiquement à l'identique.

Quant à la troisième victime, les faits remontent à seulement quelques semaines. Sauf que pour elle, le téléphone ne sonnera pas. "Il a commencé à m'embrasser et à me déshabiller, je pensais que je n'avais plus le choix", explique-t-elle. "Il est devenu soudainement très brutal et a commencé à me mordre partout et à m'étrangler. Il a mis un préservatif pour me pénétrer, ça m'a fait très mal."

>> Réécouter l'épisode de l'émission Vacarme qui suit le cheminement d'une jeune femme après son viol :

La majorité des victimes de viol ne porteront jamais plainte à la police. [Fotolia - zdyma4]Fotolia - zdyma4
VIOL: Revivre / Vacarme / 26 min. / le 25 avril 2017

De nombreux autres cas

Trois victimes ont osé témoigner, mais elles seraient en réalité beaucoup plus à avoir subi des agressions de cet homme. Deux amies l'ont découvert grâce à un compte Instagram. L'une d'entre elles, qui gère ce compte, publie régulièrement les témoignages de victimes d'agression et d'harcèlement. Après y avoir parlé du cas de cet homme, elle aurait reçu près d'une trentaine de témoignages liés à l'homme en question.

>> Lire aussi : Une femme sur cinq a déjà subi des violences sexuelles en Suisse

"Certaines victimes avaient essayé d'agir, mais sans aller plus loin que le fait de prévenir leurs amies. Je me suis dit que je devais essayer de faire plus, car cela risque d'arriver à d'autres", raconte la jeune femme qui estime qu'il s'agit aussi de "montrer que ce n'est qu'un exemple et qu'il y en a probablement d'autres en Suisse romande ou ailleurs".

Difficile reconnaissance pénale

Les trois victimes n'ont pas porté plainte par peur de manquer de preuves et de ne pas être crues. Pourtant, légalement les actes d'ordre sexuel sont tout en haut de l'échelle dans la gravité des délits et le code pénal prévoit qu'ils soient poursuivis d'office.

"A ce titre, quand on a connaissance d'une agression sexuelle, on peut investiguer sans même avoir besoin de la plainte de la victime, explique Nicolas Rizzetto, chef de la brigade criminelle vaudoise. Mais bien entendu, il nous faut des informations initiales qui vont permettre de faire une investigation policière."

La police dit collaborer avec les plateformes comme Tinder. Elle peut aussi accéder aux téléphones des auteurs pour y chercher des messages ou des éléments de preuve, mais elle le reconnaît, les procédures sont compliquées et le doute profite à l'accusé.

Nicolas Rizzetto estime aussi que dans certaines situations l'agression n'est pas toujours claire. Dans ces cas, "c'est un peu la parole de l'un contre celle de l'autre, mais on essaie de retrouver des preuves à travers les échanges qu'il a pu y avoir avant la relation".

>> Revoir le sujet de Mise au point sur les victimes de viol découragées de poursuivre une voie juridique :

Le viol devant la justice
Le viol devant la justice / Mise au point / 14 min. / le 20 novembre 2016

Le viol devant la justice / Mise au point / 14 min. / le 20 novembre 2016

Aujourd'hui les trois femmes ne veulent pas diaboliser les réseaux sociaux, mais elles appellent à la vigilance. Si les mauvaises rencontres peuvent arriver partout, pour elles l'anonymat accélère les choses. "Il se sert de son anonymat pour attirer les gens, faire croire que c'est un super photographe et qu'il est prof de piano. Donc oui, pour lui les réseaux c'est vraiment pratique."

Après des signalements, le compte Tinder de cet homme a été fermé. Il l'a rouvert quelques jours plus tard sous un autre nom et, à ce jour, il est encore actif en ligne.

Céline Brichet/iar

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