Modifié

Le personnel soignant formé au Canada risque d'être "déclassé" en Suisse

Le personnel infirmier d'une unité de soins intensifs du CHUV en réunion. [KEYSTONE - Jean-Christophe Bott]
Le personnel infirmier canadien travaillant en Suisse risque la perte d’équivalence / La Matinale / 3 min. / le 18 mai 2021
En raison de nouvelles normes fédérales, le diplôme en soins infirmiers canadien ne sera plus reconnu à partir de cet été. Dans le canton de Vaud, plus de 200 professionnels de santé canadiens seraient concernés et certains risquent d'être déclassés.

Avec la nouvelle ordonnance sur la reconnaissance des professions de la santé entrée en vigueur en février 2020, le diplôme québécois (DEC) ne sera plus reconnu, car jugé inférieur au bachelor helvétique. Les titulaires de ce diplôme ne seront plus considérés comme infirmiers, mais assimilés à un assistant en soins et santé communautaire.

Pour Nathalie Chantal, infirmière québécoise à l'hôpital de Morges, qui exerce en Suisse depuis 1994 et qui n'a toujours pas obtenu son équivalence, ce "mépris" est inadmissible. "Je n'accepte pas de ne pas être reconnue pour le travail que je fais depuis plus de 27 ans dans les hôpitaux en Suisse."

C'est aberrant de nous jeter à la poubelle, après être venu nous chercher

Nathalie Chantal, infirmière québécoise en Suisse depuis 1994

Pour se faire entendre, Nathalie a créé le groupe Facebook "Québécois en suisse Reconnaissance diplôme Infirmier" qui compte une centaine de membres.

Le casse-tête de la mobilité internationale

Il y a 20 ans, le CHUV avait mené une vaste campagne de recrutement au Québec. Aujourd'hui l'hôpital vaudois s'engage à soutenir sa trentaine d'employés concernés. Mais si une personne titulaire uniquement d'un DEC canadien ne parvenait pas à faire les démarches dans les temps, elle perdrait la possibilité d'exercer en qualité d'infirmière. Il y aurait donc potentiellement un changement de fonction et de salaire. Le CHUV assure toutefois que l'absence de reconnaissance du diplôme n'entraînera aucune rupture de contrat.

"Il n'y a aucune volonté politique d'écarter les professionnels canadiens de nos hôpitaux. Surtout en période de pandémie, et leurs années d'expériences sont en principe toujours valorisées", explique Marc Bieri, responsable des professions de la santé auprès de la Croix-Rouge. Le Conseil fédéral a chargé la Croix-Rouge suisse de s'occuper de la reconnaissance des titres étrangers.

Une formation deux fois plus longue en Suisse

"La protection de la santé du patient doit aussi être prise en considération. Au Canada, la formation nécessite 2500 heures, alors qu'en Suisse c'est le double", précise Marc Bieri.

Une situation qui révèle aussi le casse-tête de la mobilité internationale pour les professionnels du secteur face à des systèmes de santé et des formations qui évoluent constamment.

La faîtière nationale des infirmières et infirmiers (ASI), suit le dossier des infirmiers et infirmières québécoises de près et se veut rassurante. "Nous devrions régler la situation des personnes qui travaillent en Suisse depuis longtemps assez facilement", rassure l'ASI.

L'affaire a aussi trouvé un relais politique par la voix du conseiller national Vert'libéral François Pointet. Le Vaudois a approché l'Office fédéral de la santé publique et la Croix-Rouge.

Les professionnels de santé canadiens doivent en tout cas se presser de faire leur demande de reconnaissance auprès de la Croix-Rouge.

>> Grand débat de Forum le 06.07.2021: Infirmières québécoises, la Suisse est-elle ingrate? :

Le débat - Infirmières québécoises, la Suisse est-elle ingrate?
Le débat - Infirmières québécoises, la Suisse est-elle ingrate? / Forum / 23 min. / le 6 juillet 2021

Julie Rausis/Katia Bitsch

Publié Modifié