Une vidéo tournée par un pendulaire révèle que quatre minutes et trente secondes, en tout cas, se sont écoulées entre le moment où l'homme de 37 ans touché mortellement par balles à Morges (VD) s’est écroulé sur le sol et celui où un massage cardiaque lui a été prodigué.
La RTS a pu obtenir cette séquence révélée par Le Courrier. Description de ce document, seconde par seconde.
0'00 – 0'30
Victime inerte sur le sol
Les premières images montrent deux policiers sur le quai qui tiennent en joue l’individu allongé sur le sol. Il vient d'être atteint par balles après s'être avancé avec détermination et muni d'un couteau vers un agent.
L'homme porte un jean, un pull jaune et sa tête semble couverte par un habit. Il ne bouge pas et une casquette se trouve à quelques centimètres de lui. On ne voit pas ses mains, elles sont sous son ventre. Un des policiers s’avance très prudemment vers lui tout en échangeant avec un tiers via sa radio.
0'31 – 0'39
Arrivée d'un troisième policier
Un troisième policier apparaît dans le champ de vision, mais ne semble pas tenir d’arme en main.
0'40 – 0'56
Un agent s'approche de la victime
Un policier dégage le bras gauche de l’homme avec son pied puis le laisse dessus pour l’empêcher de bouger. Il est alors toujours en discussion radio. Un de ses collègues dégage ensuite le bras droit avec sa main.
0'57 – 1'17
La victime menottée
Le troisième policier menotte l’individu dans le dos. Ce dernier est immobile depuis le début de la séquence.
1'18 – 1'35
Individu placé en position latérale de sécurité
Un policier ramasse ses gants qui sont sur le sol à quelques mètres de l'individu. Pendant ce temps-là, un collègue commence à placer l'homme au sol en position latérale.
1'36 – 1'53
Couteau sur le sol
Le policier qui vient de ramasser ses gants s'aperçoit alors que le couteau est sur le sol, sous le torse de l'homme. Il pose rapidement son pied sur le couteau et le dégage quelques mètres plus loin. Dans les secondes qui suivent, son collègue finit de placer l'homme en position latérale.
1'54 – 2'04
Agents toujours à proximité de la victime
Les trois agents sont à quelques mètres de l'homme. L'un d'eux, toujours le même, est en discussion radio. Il semble fixer l'individu avant de quitter le champ.
2'05 – 2'29
Couteau déplacé
Ses deux collègues qui sont dans le champ semblent attendre, mais on ne sait quoi. On devine qu'ils discutent entre eux. Puis l'un d'eux prend le couteau, qui est sur le sol, près de la voie ferrée, et le déplace au milieu du quai.
2'30 – 2'57
Discussion entre policiers
L'agent qui était en discussion radio est de nouveau dans le champ de vision. Il regarde avec attention la voie ferrée avant d'enlever ses gants et de discuter avec un collègue, qui retire aussi les siens. Ils ne prêtent pas vraiment attention à l'homme au sol, toujours immobile.
2'58 – 3'30
Une personne pointée du doigt
L'agent "à la radio" s'approche de l'individu, dégage légèrement ses jambes avec ses pieds et remet ses gants. Pendant ce temps, son collègue s'approche lui aussi, observe l'individu à un bon mètre de distance, mais ne fait rien. Soudain, l'un des deux agents montre quelqu'un du doigt.
3'31 – 3'51
Arrivée d'un infirmier
Une personne entre dans le champ de vision. Elle porte un casque et pousse une trottinette. C'est un infirmier. Il discute avec les policiers qui lui donnent des gants et lui montrent le couteau au sol pour qu'il ne marche pas dessus. Ils se dirigent vers l'individu.
3'52 – 4'31
Mise en place pour le massage cardiaque
Un policier enlève l'habit qui recouvrait le visage de l'individu. L'infirmier l'allonge alors sur le dos, aidé par un agent, puis soulève son pull. La vidéo se termine ainsi. Le massage cardiaque n'a toujours pas eu lieu.
Communication de la police
Une information erronée
Cette vidéo montre donc clairement que plus de 4'30 se sont écoulées entre le troisième coup de feu et le massage cardiaque. Ce document prouve que la police cantonale vaudoise a livré une information erronée dans son communiqué de presse diffusé dans les heures qui ont suivi le drame en écrivant noir sur blanc que "blessé, l'homme a été immédiatement pris en charge par les policiers qui ont fait appel aux services sanitaires".
Confrontée mercredi matin par la RTS à cette vidéo, la police cantonale a alors corrigé ses propos dans un deuxième communiqué de presse diffusé mercredi soir, précisant que "le premier geste de réanimation a été prodigué par un infirmier présent sur les lieux et non par les policiers, et ce environ 4 minutes après le dernier tir".
Les policiers ont-ils tardé à porter secours à l’homme atteint par balles? Interrogé sur ce point jeudi dans l’émission Forum, le procureur général vaudois, Eric Cottier, a répondu que l'instruction pénale devra aussi faire la lumière sur cette question.
"C'est l'entier de l'intervention que l'enquête doit cerner pour déterminer précisément ce qu'il s'est produit", a-t-il affirmé.