Pour sa première présentation de budget, après deux décennies sous l'ère de Pascal Broulis, la nouvelle ministre des finances Valérie Dittli a insisté sur "le contexte instable" actuel, entre inflation, guerre en Ukraine, pénurie énergétique et changement climatique. "Il est difficile de construire un budget face à tant de crises", a-t-elle reconnu jeudi devant la presse à Lausanne.
"Si la Suisse et notre canton ne peuvent pas se permettre dans une situation dure pour les ménages d'aider la population, pour être honnête, je ne sais pas qui pourrait le faire", souligne par ailleurs la magistrate centriste dans le 12h30 de la RTS.
Ce budget s'affiche dans le rouge pour la troisième année consécutive. Il respecte toutefois, comme lors des années précédentes, la limite dite du "petit équilibre" et n'entraîne pas de mesures d'économies spécifiques. Pour rappel, le "petit équilibre" signifie que les recettes couvrent les charges avant les amortissements des investissements.
"Soutenir le pouvoir d'achat"
Avec ce budget 2023, qui devra être validé en décembre par le Grand Conseil, le gouvernement vaudois a voulu "soutenir le pouvoir d'achat" de la population, a souligné Valérie Dittli. Cela se fera par plusieurs "mesures phares", à commencer sur le plan fiscal, où une baisse de 73 millions de francs est envisagée pour les personnes physiques.
Les déductions pour l'assurance-maladie et les frais de garde seront ainsi relevées, tandis l'imposition sur l'estimation des objets mobiliers sera réduite. Il est également prévu d'adapter les barèmes et déductions fiscales pour compenser les effets de l'inflation. Cela a "notamment pour conséquence d’augmenter la déduction pour contribuable modeste", assure le Conseil d'Etat dans son communiqué.
A noter que d'autres changements fiscaux pourraient intervenir ces prochains mois, différentes propositions ayant été lancées récemment (motions de la doite et de la gauche au Grand Conseil, initiative populaire des milieux économiques). Ces différents objets sont "sur la table" et seront abordés lorsque le Conseil d'Etat présentera fin octobre son programme de législature, a indiqué Valérie Dittli.
Salaires augmentés
Parmi les autres particularités du budget 2023, il est prévu de consacrer 71 millions de francs pour adapter les salaires de l'administration cantonale et du secteur parapublic afin, là aussi, de contrer l'inflation. Un montant de 32 millions doit aussi être alloué pour augmenter l'enveloppe des subsides aux primes d'assurance-maladie.
En tout, les charges brutes s'élèvent à 11,067 milliards, soit une progression de 394 millions (+3,7%) par rapport au budget 2022. Cette hausse s'explique, entre autres, par la création de 424,4 postes (équivalents plein-temps - ETP), surtout dans l'enseignement et la pédagogie spécialisée (199,6 ETP).
Un milliard d'investissements
Du côté des revenus, le canton table sur une hausse de 3,4% à 10,84 milliards. Les recettes fiscales devraient afficher un gain de 4,9%, en tenant compte des 73 millions de baisses fiscales prévues. Valérie Dittli a notamment tenu à souligner "la solidité de l'économie vaudoise, due à sa grande diversité", ce qui permet d'envisager une progression de 14,4% des impôts sur les personnes morales.
En matière d'investissements, un peu plus d'un milliard de francs est prévu l'an prochain, "un niveau encore jamais atteint", a assuré Valérie Dittli. Cette somme vise "les générations futures" en permettant notamment d'affronter la crise climatique et de renforcer les transports publics, a-t-elle dit. Malgré ces investissements et le déficit budgétaire prévu, la dette devrait rester stable à 975 millions.
ats/ami
Des partis mitigés
Du côté des partis, l'Alliance vaudoise (PLR, UDC et Centre) a pris note "avec satisfaction" de ce projet de budget. Elle salue les réductions fiscales qui, selon ses calculs, entraînent une réduction d'impôt en moyenne de 1800 francs pour un couple marié avec deux enfants.
La droite dit néanmoins "s'inquiéter" de l'augmentation "significative" du nombre de nouveaux postes, de même que la hausse de 130 millions de francs dans le secteur social.
A gauche, Les Verts parlent d'un budget "en demi-teinte". Ils se réjouissent de la création de nouveaux postes, de l'indexation des salaires et de l'augmentation des déductions pour frais de garde. Mais ils regrettent "le manque d'ambition" en matière climatique et "le manque de propositions" pour soutenir les personnes les plus touchées par l'inflation.
Le Parti socialiste souligne que des "acquis" sont préservés avec la politique de subsides pour l'assurance-maladie. Les socialistes émettent toutefois plusieurs réserves, au sujet par exemple des mesures fiscales qui "manquent leur cible" en ne favorisant que les citoyens "les plus aisés".
Encore plus critique, Ensemble à gauche n'y trouve pas son compte: ce budget "ne répond ni aux besoins sociaux ni à l'urgence écologique."