"Une centriste zougoise, ça vaut bien un UDC vaudois!", ou quand la position de Valérie Dittli interroge
Après les 100 premiers jours du nouveau Conseil d'Etat vaudois, les projecteurs sont tournés vers l'élue du Centre, Valérie Dittli. Plus jeune conseillère d'Etat en fonction dans le pays, sans troupes au Parlement, sans passé politique, elle se retrouve entre les trois élus rose-vert et les trois élus du PLR. Cette inconnue en politique est le pivot de cette nouvelle majorité.
Les décisions de Valérie Dittli surprennent parfois son monde. Par exemple, lors de la campagne électorale, elle s'était montrée très sensible à l'environnement. Mais au coeur de l'été, la décision de tirer le loup a provoqué un clash avec le ministre écologiste. Pour celle qui est aussi en charge de l'agriculture, le loup est un nuisible à éradiquer, alors que pour le Vert Vassilis Venizelos, il s'agit d'un prédateur dont il faut réguler les effectifs. Le positionnement, perçu comme dur, de l'élue du Centre a interpellé.
Proche de l'UDC?
Depuis son entrée en fonction, Valérie Dittli est en effet apparue très à droite, voire très proche de l'UDC. Une boutade circule d'ailleurs parmi les politiciens - droite comprise -, "une centriste zougoise, ça vaut bien un UDC vaudois!".
René Knüsel, politologue à l'Université de Lausanne, tempère ce bon mot, allusion à ses origines de Suisse centrale. "La comparaison entre Zoug et le canton de Vaud, et les extrêmes politiques, c'est loin d'être une plaisanterie. Zoug est un canton très conservateur."
"Mais Valérie Dittli a fait le choix de venir en Suisse romande, elle a cherché à s'acclimater, elle a montré aussi un certain nombre de sensibilités. Et je pense qu'elle a réussi à prendre sa place au centre. Je ne pense pas qu'elle va vouloir concurrencer l'UDC au sein du gouvernement", analyse René Knüsel.
Dans les faits, Valérie Dittli reste encore une énigme pour beaucoup. Où se situe-t-elle politiquement? La réponse a son importance, car elle permet de comprendre si le gouvernement vaudois a basculé vers le centre droit, ou vers une droite très à droite.
Les élus UDC le pensent, parce que Valérie Dittli a assisté à toutes les séances de leur groupe au Grand Conseil. Depuis la mort de Jean-Claude Mermoud en 2011, les députés agrariens n'avaient plus vu un ministre lors de leurs séances de travail.
Marquer son indépendance
Cette présence ne dit néanmoins rien des décisions à venir de la ministre centriste. Elle vient d'ailleurs de présenter un budget qui ressemble à un exercice de l'ère Pascal Broulis. La gauche espère que cela soit annonciateur d'une continuité. Dans l'autre camp, ce budget est qualifié de compromis en attendant les changements.
Au sein de l'alliance vaudoise (PLR, UDC et Centre), la pression est maximale. Certains craignent même d'être condamnés à décevoir. En effet, lors des élections, l'alliance de droite a vendu du neuf, notamment en matière fiscale, mais ce cap doit être donné par le gouvernement.
"Il y a un travail à effectuer à droite, dans lequel les PLR doivent comprendre que Valérie Dittli a un espace. Certes son élection s'est faite sur une liste PLR avant tout et elle a des choses à redonner, mais elle est capable de marquer son indépendance par rapport au PLR, tout en composant assez habilement avec eux", estime le politologue René Knüsel.
Le souci de la droite
L'alliance de droite, dominée par le PLR, a certes gagné les élections et retrouvé une majorité à l'exécutif cantonal. Mais le grand vieux parti doit désormais composer avec Valérie Dittli et avec l'UDC, qui sans menacer, attend des inflexions claires. Sinon, il pourrait s'émanciper et suivre sa route au Parlement.
Le premier test se déroulera à la fin du mois d'octobre. Le gouvernement présente son programme de législature 2022-2027, et l'aile économique du PLR le veut en phase avec les discours de la campagne électorale: plus de libéralisme et moins d'Etat, fut-il radical. Après 100 jours, dans le canton de Vaud, la nouvelle majorité de droite est avant tout un souci... pour la droite.
Xavier Alonso/asch