Dans son arrêt, le Tribunal fédéral (TF) estime que l'intérêt public à la production de ciment doit l'emporter, mais que la richesse de la colline du Mormont ne doit pas être ignorée.
"Le permis d'exploiter ne peut ainsi pas être délivré en l'état", indiquent jeudi Helvetia Nostra, Pro Natura Vaud et l'Association pour la sauvegarde du Mormont, qui avaient saisi la haute cour pour s'opposer à l'extension de la carrière.
Avant de délivrer ce permis, il faudra que les propositions de comblement du site soient entérinées, notamment par la Commission fédérale pour la protection de la nature et du paysage, précise Michel Bongard, secrétaire exécutif de Pro Natura Vaud.
"Ni une victoire, ni une défaite"
Selon lui, l'arrêt du TF n'est "ni vraiment une victoire, ni non plus une défaite". Le Mormont continuera d'être "mangé" par la carrière avec "d'énormes pertes en matière de paysage et de biodiversité". Les juges fédéraux ont toutefois aussi reconnu que le site était "précieux" et qu'il ne pouvait pas être détruit sans compensation.
Les modalités du comblement de la colline doivent être encore réglées. "Le trou sera gigantesque. Que va-t-on mettre à la place de la surface détruite?", se demande Michel Bongard.
Les trois associations environnementales disent désormais attendre les résultats d'études, lancées pour rechercher une solution de comblement "afin de compenser au mieux l'impact paysager du projet qui se situe dans un paysage reconnu d’importance nationale."
Une cimenterie d'importance nationale
S'il a admis le recours sur ce point, le TF souligne néanmoins que la production de ciment au Mormont, sur les hauteurs des villages de La Sarraz et d'Eclépens, est justifiée.
"Il ne peut être question que la production de ciment n'aurait pas d'importance nationale", écrivent les juges fédéraux. Ils rappellent que la consommation annuelle de ciment en Suisse s'élève à près de 500 kilos par habitant. Et que la cimenterie d'Eclépens assure quelque 20% des besoins nationaux.
La carrière sur le Mormont est en service depuis le début des années 1950. Les matériaux venant à manquer, Holcim avait demandé une nouvelle extension sur 200 mètres de large, 600 mètres de long et 70 mètres de profondeur. Cette extension touche particulièrement le plateau de la Birette, au sommet de la colline.
Des "garanties" sont nécessaires
"Ce n'est pas un désaveu", réagit le conseiller d'Etat en charge de l'Environnement Vassilis Venizelos, jeudi dans l'émission de la RTS Forum. Le permis d'exploiter "entre en force". L'exploitation du site par Holcim peut donc commencer, selon le conseiller d'Etat.
Mais des "garanties" doivent être apportées pour la restauration des zones détruites, remarque-t-il. Le canton de Vaud travaille déjà depuis "plusieurs mois" sur cette stratégie de comblement, qui devra désormais être "affinée" dans les semaines à venir, ajoute Vassilis Venizelos. "Nous sommes prêts - avec les différentes études - pour aller de l'avant et répondre aux injonctions du Tribunal fédéral."
Selon lui, outre l'injonction du TF, l'exploitation du Mormont doit s'inscrire dans "une stratégie globale" qui tient compte des impératifs en matière de gestion des ressources naturelles et d'économie circulaire.
ZAD et initiative populaire
Ce projet d'extension est combattu en justice depuis plusieurs années par les associations de défense de l'environnement, mais aussi lors de la retentissante Zone à défendre (ZAD) qui, entre octobre 2020 et mars 2021, avaient vu des militants occuper la colline.
Parallèlement, une initiative populaire, menée notamment par les Verts vaudois, a abouti. Le texte, qui vise à inscrire la protection du Mormont dans la Constitution vaudoise et à encourager les autorités à s'émanciper du béton, pourrait être soumis au peuple si le Grand Conseil l'approuve ou lui oppose un contre-projet.
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ats/iar/vajo