Flottille de papier à la cathédrale de Lausanne en hommage aux migrants disparus en mer
Les bateaux, fabriqués par des élèves vaudois, jonchent le sol en désordre et "forment une vague qui rappelle la mer", décrit Valérie Despont, enseignante en arts visuels et en charge des migrants pour l'association Nela, au micro d'Ici La Suisse jeudi.
L'objectif n'était pas de faire quelque chose de joli, explique-t-elle. "Je ne voulais absolument pas que ce soit esthétique et séduisant puisqu'on parle de quelque chose d'extrêmement bouleversant, choquant et grave."
Rendre des chiffres concrets
Valérie Despont a voulu faire cette installation "comme ça", pour que le public prenne conscience du nombre de migrants qui disparaissent chaque année en mer. "Chacun de ces bateaux en papier, c'est une personne décédée", précise l'enseignante à ses élèves âgés de 14 à 15 ans venus voir l'oeuvre.
"Chaque jour, il y a un encart dans les journaux avec 'un bateau de migrants avec tant de personnes à bord a coulé dans la mer'. On lit ces chiffres mais on ne se sent pas tellement concernés et on oublie. Là, c'est visuellement assez puissant", commente-t-elle.
L'installation est complétée par dix-sept témoignages audios accompagnés d'un portrait photo à télécharger, qui permet de comprendre que la traversée n'était "pas facile".
Les élèves en visite se sont prêtés au jeu et ont écouté les témoignages sur leur téléphone. Pour l'une d'entre eux, ca a été l'occasion de mesurer la chance qu'elle a dans sa vie. "On ne se rend pas forcément compte de la chance que l'on a d'être en Suisse. Là, la personne nous parle de face donc c'est encore plus émouvant".
Un autre a été marqué par l'humanité qui se dégage de l'exposition. "Ce qui m'a surpris, c'est que ce sont des gens que l'on pourrait rencontrer n'importe où, dans le bus par exemple. A première vue, on ne pourrait pas tellement dire qu'ils ont vécu la traversée difficile qu'ils racontent. Ce qui m'a le plus touché, c'est que ce sont des gens comme tout le monde."
Sujet politique
Pour parler de la migration à ses élèves, sujet politique difficile à aborder, l'enseignante a trouvé une astuce. "J'ai mis en place une sorte de module et je demande à un jeune issu de la migration de raconter son voyage devant les classes. J'essaie de donner conscience aux enfants que ça existe, mais je ne vais pas plus loin. Je n'entre pas dans le débat politique."
Elle a choisi d'implanter son exposition dans la cathédrale de Lausanne car c'est "un lieu très emblématique pour beaucoup de Vaudois et aussi pour les jeunes issus de la migration". "Il y avait une vraie fierté d'être ici, et puis évidemment j'aime ce lieu parce qu'il est calme. Les vitraux donnent des lumières fantastiques et ça permet d'adoucir ce propos très violent. Je trouvais que ça fonctionnait bien."
Sujet radio: Julie Rausis
Adaptation web: Julie Marty