L'élu socialiste raconte avoir reçu la semaine dernière deux e-mails anonymes truffés d’injures racistes et de menaces avec des références à la cause palestinienne pour laquelle il avait publiquement affiché son soutien le jour-même dans une interview accordée au Blick.
Le Lausannois décide alors de porter plainte et se rend au poste de police du quartier du Flon, à Lausanne. "Le policier s'est mis très rapidement à me dissuader en expliquant que cela ne servirait pas à grand-chose, que c'était le risque du métier, en tant qu'élu, d'être exposé et de recevoir ce type de messages", raconte-t-il vendredi dans l'émission Forum.
A la question du policier de savoir pourquoi il serait ciblé aujourd'hui par ces insultes, l’élu lausannois répond que c'est probablement lié à sa prise de position sur les Palestiniens. "Il me répond que c'est assez normal, quand on évoque ce type de sujet clivant, de se faire attaquer. Puis, me demande ce que je pense de l'attaque du Hamas en Israël".
La réponse de la Police de Lausanne
Au bout d’un moment, Mountazar Jaffar explique vouloir couper court à cet échange avec le policier et procéder au dépôt de plainte. Mais le policier lui aurait répondu que c'était impossible de le faire ce jour-là. Il lui donne un rendez-vous deux semaines plus tard.
Pour l’élu socialiste, ce comportement est tout simplement inacceptable. Bien décidé à ne pas en rester là, il compte déposer une interpellation urgente mardi prochain à la séance du conseil communal pour mieux encadrer les procédures de dépôt de plainte.
Sollicitée par la RTS, la police de Lausanne ne se prononce pas sur les faits. Par écrit, elle explique vouloir mettre en lien les propos de Mountazar Jaffar avec ceux de son collaborateur.
Pour les dépôts de plainte, elle précise que les policiers n'auraient pas de marge de manoeuvre individuelle puisqu'ils doivent se conformer à une directive cantonale. La police lausannoise confirme également avoir pris contact avec le plaignant dans le but d'identifier la source du mécontentement. Ce que confirme l’intéressé.
Plusieurs questions
L’élu compte déposer plusieurs questions à la Municipalité mardi prochain. Parmi celles-ci, la question de la formation pour le personnel policier qui recueille les plaintes, mais aussi quelles solutions la Ville de Lausanne compte mettre sur pied à court terme pour éviter que de tels comportements ne se reproduisent.
Pour Mountazar Jaffar, il y a clairement un lien entre cette expérience au poste de police et son apparence d’homme arabe, puisqu'il est d’origine irakienne.
Pas une première
Ce n’est pas la première fois que Mountazar Jaffar critique les forces de l’ordre. Pour lui, il existe du racisme structurel au sein de la police, comme dans d’autres institutions. Et il faut prendre des mesures.
L’été dernier, le procès de six agents accusés de violence et de racisme après la mort d’un Nigérian suite à un contrôle musclé avait suscité le débat. Le procès s’est soldé par un acquittement.
Mais sur les réseaux sociaux, où Mountazar Jaffar est très actif, de telles accusations ont à nouveau été formulées ces dernières heures.
"Inadéquat"
"Je regrette ce qui peut arriver lorsqu'une personne considère être mal traitée, mal reçue par la police", a réagi le conseiller municipal lausannois Pierre-Antoine Hildbrand, en charge de la sécurité, vendredi dans l'émission Forum.
L'élu a également estimé qu'il était "inadéquat" qu'un policier entame une discussion politique dans un poste de police, avec une personne qui ne vient initialement pas dans ce but. "Je me réjouis qu'un rendez-vous ait été fixé pour prendre cette plainte, puisqu'à l'origine il y a des propos à tout le moins injurieux ou racistes à l'égard de M. Jaffar", a-t-il fait savoir.
L'élu a également expliqué avoir mis en place des procédures pour les situations où des personnes estiment être mal traitées. "Nous faisons un effort particulier pour mieux prendre en charge les victimes à travers la création d'une unité spéciale dédiée", a-t-il encore expliqué au micro de la RTS.
Martine Clerc/hkr