Avant de rentrer dans le vif du sujet devant la Cour d'appel du Tribunal cantonal, délocalisée à Renens, Me Simon Ntah a refait plusieurs réquisitions tout en remettant à nouveau vertement en cause l'enquête du Ministère public. Il a dit qu'elle était "une calamité" et "pourrie". "Dire qu'elle était sérieuse et menée avec diligence est une hérésie", a-t-il clamé.
Comme en première instance, l'avocat de la partie plaignante a plus particulièrement critiqué une enquête de voisinage "bâclée", une possible collusion entre les policiers ou encore des expertises médico-légales "incohérentes" entre elles pour déterminer les causes exactes de la mort de Mike Ben Peter.
"Aggravation de l'accusation"
Il a de nouveau soumis aux juges "une aggravation de l'accusation". Alors que le Ministère public a retenu l'homicide par négligence, Me Ntah souhaite que la Cour d'appel examine aussi les qualifications juridiques de lésions corporelles simples, d'abus d'autorité et surtout d'homicide par dol éventuel. A savoir pour cette dernière que les policiers auraient été conscients qu'ils prenaient un risque et qu'ils s'en seraient accommodés.
Me Ntah souhaite aussi que la Cour auditionne et confronte les deux experts suisses qui ont établi les deux expertises médico-légales de référence dans cette affaire, jugées "incohérentes" dans certaines conclusions par l'avocat. Il demande aussi que deux experts américains de renom soient entendus, concluant explicitement que Mike Ben Peter est décédé en raison des manoeuvres violentes des policiers.
Enfin, l'avocat a fait une troisième requête, celle d'avoir plus de temps pour analyser des compléments des expertises suisses, dont l'une a été déposée il y a tout juste douze jours. En clair, il demande donc un renvoi du procès à une date ultérieure.
"Se rapprocher enfin de la vérité"
Me Ntah a rappelé sa "déception et son incompréhension" du jugement de première instance. "Les faits ont été mal examinés, le tribunal s'est interdit de réfléchir, il n'a pas posé toutes les questions possibles. Il n'a pas été jusqu'au bout".
>> Lire : La famille de Mike Ben Peter fait appel après l'acquittement des six policiers
"Je vous demande d'avoir le courage de faire toute la lumière et de vous poser toutes les questions sur les faits", a-t-il lancé aux trois juges. Accepter ses réquisitions équivaudrait à "enfin se rapprocher de la vérité", selon lui.
Les six avocats des policiers ont tour à tour rejeté toutes les réquisitions, à commencer par celle de renvoyer le procès. Ils ont discrédité les expertises privées, jugées "irrecevables", évoquant deux "champions américains très connotés pour dénoncer les violences policières". Ils ont rappelé que les deux expertises médicales figurant au dossier étaient fouillées et complètes.
De son côté, le procureur Laurent Maye s'est défendu des attaques de l'avocat de la victime, estimant qu'aucune description des faits n'avait été omise dans son enquête. "Il faut ici juger les faits et ne pas faire un procès d'intention", a-t-il insisté. Il n'a pas hésité à dire que "la théorie du complot n'était pas loin", s'agissant des propos tenus par Me Ntah. Il a répété qu'il n'adhérait pas au meurtre par dol éventuel.
L'audience reprend à 14h30 avec la décision de la Cour d'appel sur les réquisitions.
>> Lire aussi : Le tribunal de Lausanne vandalisé après l'acquittement des policiers dans l'affaire Mike
ats/jop