Croulant sous les grues et les chantiers, La Tour-de-Peilz subit la densification de plein fouet
Idéalement blottie au bord du Léman entre Vevey et Montreux, La Tour-de-Peilz attise les convoitises. Sous les nombreuses grues qui surplombent leur villa, plusieurs propriétaires de cette commune de la Riviera en font l'amer constat.
"On a eu énormément de visites, de promoteurs qui sont venus, qui veulent acheter", témoigne l'une d'elles dans le 19h30, au pied de sa maison. "Je trouve ça très intrusif, je n'aime pas du tout", déplore sa maman. S'il n'est pas question pour elles de céder à l'appétit des promoteurs, d'autres propriétaires ont déjà fait le pas. Résultat: la commune vit aujourd'hui au rythme des pelleteuses.
Les autorités communales désarmées
Si La Tour-de-Peilz est devenue un nouvel eldorado pour les promoteurs immobiliers, c'est qu'elle est la seule commune de la région à avoir déjà validé son nouveau Plan général d'affectation. Ce PGA, en vigueur depuis 2019, permet de densifier l'ensemble du périmètre urbain, comme l'exige la loi sur l'aménagement du territoire, pour protéger les zones naturelles et les terres agricoles.
Face à cette frénésie, les autorités ont tenté d'agir. "On a essayé de mettre un moratoire sur les constructions, mais le canton nous a dit que c'est un Plan général d'affectation qui est récent et qu'on ne peut donc pas bloquer les constructions, pour préserver le droit des propriétaires", déplore Elise Kaiser, conseillère municipale en charge de l'urbanisme. "On est un peu pieds et poings liés", constate-t-elle, impuissante.
Boom démographique
A défaut de pouvoir geler les constructions, les autorités tentent de sauver les arbres et les maisons qui peuvent encore l'être. En attendant, La Tour-de-Peilz poursuit sa croissance, avec plus de 14'000 habitants prévus à l'horizon 2035, soit une hausse de 30% en 20 ans.
Les Boélands, eux, observent bon gré mal gré leur ville se transformer, alors que le manque d'infrastructures se fait cruellement sentir. "Ce qui n'a pas été anticipé, comme l'accueil des enfants, les écoles et les crèches, on doit maintenant le rattraper", reconnaît Elise Kaiser.
Yoan Rithner
Une problématique brûlante dans toute la Suisse
Si La Tour-de-Peilz a sans doute voulu grandir trop vite, la problématique dépasse largement l’Arc lémanique. Malgré la pénurie de logements, plusieurs projets immobiliers ont été récemment rejetés par la population. Dernier exemple en date en septembre dernier, au Mont-sur-Lausanne.
Pour la présidente du gouvernement vaudois, cette résistance reflète un phénomène de "not in my backyard". "Aujourd’hui, on a une recrudescence de gens qui n’ont pas forcément envie qu’on construise à côté de chez eux, alors même qu’on est dans des centralités, à côté des services, près du rail, etc.", précise Christelle Luisier dans le 19h30.
A l’aune d’un autre rejet récent, celui de l’élargissement des autoroutes, la conseillère d'Etat constate aussi un sentiment de saturation dans la population. L'élue reste toutefois convaincue que la croissance est bénéfique pour la prospérité du pays.
"C’est aux autorités de pouvoir rassurer et pour le faire, il faut que ce développement reste qualitatif, donc qu’il y ait d’une part des logements avec des loyers abordables, et que d’autre part la qualité de vie, qui passe par les infrastructures, soit au rendez-vous."