L’UNIL confère chaque année des doctorats honoris causa (d.h.c.) à des personnalités aux mérites particuliers dans les sciences, les lettres ou les arts. En 1937, elle attribue ce titre au dictateur Benito Mussolini, à une époque où les exactions du régime fasciste sont bien connues, rappelle-t-elle mercredi dans un communiqué.
Dès cette date, des lettres, des pétitions ou des interpellations issues de la société civile et des milieux politiques lui ont régulièrement demandé des explications et exigé le retrait du titre honorifique. En 2022, la direction de l'alma mater condamne la remise de ce titre et affirme qu'en 1937 l'UNIL a failli à sa mission et aux valeurs académiques fondées sur le respect de l’individu et la liberté de pensée.
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Se poser les bonnes questions
Si elle n'entre pas en matière sur le retrait du titre, l'UNIL a décidé d'entreprendre des recherches historiques et des actions mémorielles. L'exposition "Docteur Mussolini, un passé sensible" en fait partie. Elle aborde la question du mémoriel de manière large, tout en rendant visible et en interrogeant le passé sensible de l'institution académique.
"Cette exposition propose une immersion dans les années 1930, mais nous ne nous arrêtons pas au contexte historique. Il s'agit également de montrer pourquoi aujourd'hui ce passé-là dérange encore, pourquoi il pose encore des questions et qu'est-ce qu'on peut en faire", explique dans le 12h45 la responsable de l'exposition Olga Canton Caro.
L’exposition dresse un état de la question sans prétendre à l'exhaustivité, afin de questionner un phénomène autour duquel des nombreux chantiers restent encore ouverts. Elle montre également comment l'octroi du titre est fortement marqué par la fascination et la connivence de certaines élites intellectuelles, politiques et économiques de l'époque pour le fascisme.
"Il y avait un champ magnétique autour de Mussolini"
Dans le contexte de l’époque, il y a, en Suisse, une sympathie assez large pour Benito Mussolini. "On peut parler d'un champ magnétique autour de Mussolini, avec un noyau de partisans très convaincus. Parmi les professeurs d'université, il y avait des intellectuels qui, pour différentes raisons, étaient fascinés par l'Italie fasciste et par Mussolini", détaille l'historien Marc Perrenoud à la RTS.
"Dans la laudatio qui est rédigée par les professeurs de l'Université de Lausanne, il est mis qu'il est un créateur d'une doctrine qui laissera une trace durable dans l'Histoire", précise-t-il.
Enfin, le parcours pointe les mécanismes d'acceptabilité du fascisme présents encore aujourd'hui. Il ouvre la réflexion sur la diversité des conflits mémoriels en évoquant d'autres passés sensibles liés à la Suisse.
ats/jfe