La future loi vaudoise sur l'enseignement privé inquiète les partisans de l'école à la maison
Le canton de Vaud compte actuellement environ 1000 élèves qui suivent l'école à la maison et il est l'un des plus permissifs en la matière. Sa loi sur l'enseignement privé date de 1984. Pour l'Etat, il est nécessaire de mieux cadrer cette pratique face à l'augmentation des cas: il y a dix ans, seuls quelque 200 élèves étaient scolarisés à domicile.
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Mais alors qu'une révision de la loi doit passer devant le Parlement courant 2025, des associations font part de leurs inquiétudes. Parmi elles figure l'obligation d'obtenir une autorisation de l'Etat.
L'exigence d'un "plan d'étude" critiquée
"Il sera demandé aux parents de fournir un certain nombre de documents préalables qui sont censés servir à juger la qualité future de l'instruction", expose Jeanne Rektorik, coprésidente de l'association Instruire en liberté Vaud. "Nous pensons que ce n'est pas le bon outil. Nous aimerions plutôt que les familles soient contrôlées à domicile, or la loi ne prévoit pas d'obligation de contrôle pour le moment", affirme-t-elle.
Un avis partagé par Emeline, qui témoigne dans le journal de 12h30: "Ce que préconise l'Etat, c'est plutôt moins de visites à la maison et une autorisation donnée ou non en début d'année sur la base d'un projet pédagogique établi un an à l'avance", explique-t-elle. "Mais on n'est pas dans une classe, on a une grande flexibilité. Et puis on peut faire un très beau projet pédagogique sur le papier et finalement ne pas du tout le respecter."
Tant qu'on ne mettra pas le paquet sur les heures d'accompagnement, on ne pourra pas dire qu'il y a une place pour tout le monde à l'école
Pour cette mère de quatre enfants, l'école à domicile s'est pourtant imposée comme une nécessité. "On a commencé par le système public en France. Quand on est arrivé en Suisse, on a choisi une école privée à petits effectifs, mais l'expérience n'a pas été très concluante. On a essayé une année l'école du village, mais ça s'est mal passé. Donc on a déménagé dans le canton de Vaud pour pouvoir faire l'école à la maison", raconte-t-elle.
"Je ne pourrais pas remettre mes enfants dans le système public, ou alors leurs besoins ne seraient pas respectés", poursuit-elle. "Ils ont quatre heures d'enseignement spécialisé, mais ils ne sont pas autistes que 4h par semaine. C'est une grosse charge pour les enseignants ordinaires et je pense que tant que le paquet ne sera pas mis sur les heures d'accompagnement, on ne pourra pas dire qu'il y a une place pour tout le monde à l'école."
"Pas de durcissement caché"
Certains parents s'inquiètent aussi qu'à l'avenir certains critères ne soient pas fixés dans la loi, mais dans un règlement d'application modifiable d'année en année. "C'est une façon de durcir progressivement et de rendre l'instruction à domicile quasiment impossible", accuse Jeanne Rektorik.
"Ce n'est pas notre intention de changer, il n'y a pas de plan caché là-autour", sourit le chef du département vaudois de l'enseignement Frédéric Borloz, qui se veut rassurant: il ne s'agit pas de devenir contraignant. "Dans tous les cantons suisses, il y a de plus en plus d’enfants qui [font l'école] à la maison. Certain ont mis des barrières très strictes, mais ce n'est pas notre cas", rappelle-t-il.
Sujets TV et radio: Thomas Epitaux-Fallot/Céline Tzaud
Texte web: Pierrik Jordan