Neuf prévenus vont comparaître dès lundi devant la justice vaudoise pour leur rôle dans le décès de Skander Vogt, ce détenu mort à Bochuz en mars 2010 dans sa cellule après avoir mis le feu à son matelas.
Le procès, prévu sur près d'un mois, va devoir établir les responsabilités du personnel pénitentiaire et des secours. La défense plaidera l'acquittement (lire aussi: Neuf personnes devant la justice dans l'affaire Skander Vogt).
La question de la négligence
"L'enjeu du procès est de déterminer si les prévenus ont commis une négligence qui a conduit au décès de Skander Vogt. Le procès n'est pas là pour examiner si le milieu carcéral était bien géré à l'époque", explique le procureur Sébastien Fetter.
Les personnes accusées sont la directrice de piquet ce soir-là, un surveillant sous-chef, trois agents de détention, un infirmier, deux ambulanciers et le médecin du SMUR. Elles devront répondre principalement d'homicide par négligence, d'exposition et d'omission de prêter secours.
"Je soutiens qu'il y a eu de graves négligences du personnel pénitentiaire", affirme Nicolas Mattenberger, avocat de Senda, la soeur de Skander Vogt. "C'est l'aboutissement d'une longue procédure, il a fallu beaucoup se battre pour que ce procès ait lieu".
Les moments clés de l'affaire >>>
ats/jgal
La nuit du 10 au 11 mars 2010
Les faits remontent à la nuit du 10 au 11 mars 2010. Peu avant 00h50, Skander Vogt boute le feu à son matelas dans sa cellule du quartier de haute sécurité de Bochuz.
L'incendie est vite éteint mais le personnel n'entre pas dans la cellule enfumée et veut attendre le DARD, détachement d'action rapide et de dissuasion de la police cantonale, requis pour un personnage jugé dangereux.
A 02h30, le personnel n'entend plus Skander Vogt respirer. A 02h43 les gardiens entrent dans la cellule. A 02h53, le DARD arrive. Sept minutes plus tard, le médecin arrête la réanimation et constate le décès.
L'autopsie conclura à une intoxication aiguë au cyanure provenant du polyuréthane contenu dans le matelas.
Un fait divers devenu affaire d'Etat
La mort de Skander Vogt en mars 2010 a entraîné la réforme du quartier de haute sécurité du pénitencier vaudois. Ce décès a aussi ouvert une réflexion sur le régime de l'internement.
A l'issue d'une enquête administrative demandée par le canton de Vaud, l'ancien juge fédéral Claude Rouiller rend en juillet 2010 un rapport très sévère dans lequel il reproche au personnel d'avoir confondu des directives et des pratiques et d'avoir oublié l'essentiel: porter secours immédiatement à un détenu en danger.
Face aux critiques, le conseiller d'Etat Philippe Leuba réagit. Outre la mise à pied de la cheffe du Service pénitentiaire (SPEN) Catherine Martin, il ordonne la réorganisation des pratiques. La formation est renforcée et le matériel adapté.