"Ce qui coûte le plus cher, en médecine comme ailleurs, c’est l’incompétence". Cette phrase tirée d’un article du Courrier du médecin vaudois de décembre 2016 illustre l’inquiétude des praticiens établis face à l’arrivée de généralistes étrangers à la formation discutable.
La formation des généralistes commence en Suisse par une formation de base sur six ans. Avant d'obtenir le titre de spécialiste en médecine générale, les apprentis médecins doivent encore suivre cinq ans de formation postgrade.
Exigences minimales insuffisantes
Parallèlement, pour un praticien étranger qui souhaite s’établir en Suisse, les accords bilatéraux exigent un diplôme valide et trois ans de pratique en milieu hospitalier. Or, en Suisse, un médecin sur deux a effectué une partie de sa formation à l'étranger.
Ces exigences sont insuffisantes car trop vagues, dénoncent les médecins vaudois. Il y a une brèche dans laquelle s’engouffrent certains praticiens.
Interrogé par la RTS, le Dr Philippe Randin de Genève cite le cas d’une femme médecin qui a effectué ses études à l’étranger, mais qui n’avait plus pratiqué la médecine depuis une vingtaine d’année. Cette personne a pu obtenir un titre de médecin praticien en Suisse, qui lui permet d’exercer comme généraliste.
Une dizaine de cas suspects
S'ils veulent pratiquer en Suisse, les médecins étrangers doivent au préalable faire reconnaître leur titre par la Confédération et les cantons. Mais les autorités sont désarmées pour intervenir lorsque les critères minimaux sont respectés. Une fois l’autorisation de pratiquer octroyée, il faut une plainte d’un patient pour qu’un canton puisse intervenir .
Le président des médecins vaudois, Philippe Eggiman, voit passer par exemple plusieurs centaines de demandes d'autorisation de pratique par année. Une dizaine de cas seraient suspects.
Une réponse politique
L’installation - légale - de médecins au niveau de formation problématique jette le discrédit sur la très grande majorité de médecins étrangers parfaitement qualifiés. A l'instar de Béatrice Allain Pons, généraliste française installée depuis 2013 à Lutry, qui se dit "profondément attristée, même choquée" par le comportement "non déontologique" de ses confrères qui mettent "tout le monde dans le même panier".
Pour les médecins vaudois, la réponse doit venir du politique. "Les procédures devraient permettre de lever les doutes, et le cas échéant de refuser la reconnaissance, même lorsque les conditions purement formelles sont réalisées", écrit le Courrier du médecin vaudois.
Le sujet a été porté devant les Chambres fédérales, jusqu'ici sans succès. Tenu de respecter les accords bilatéraux en la matière, le Conseil fédéral estime n'avoir qu'une marge de manoeuvre limitée.
Serge Mérillat/rens