Un fort mécontentement envers les médecins-conseils d’assurances se dégage du sondage paru dans l'édition d'octobre du Courrier du médecin vaudois (CMV).
La majorité des 800 médecins généralistes vaudois interrogés ne remettent pas en question, sur le principe, le rôle de garde-fou du médecin-conseil, qui met son expertise médicale au profit d'une caisse maladie pour avaliser ou pas le remboursement des frais.
Les sondés sont en revanche nombreux à déplorer, pêle-mêle, les lourdeurs administratives et les pressions financières de certaines caisses-maladie qui, selon eux, ne permettraient pas au médecin-conseil d’exercer sa fonction de manière indépendante et efficace.
Demandes de justification mal comprises
Près de la moitié des participants au sondage font état d'un refus "incompréhensible ou inacceptable" d'un traitement qu'ils ont prescrit. A l'inverse, seule une minorité considèrent que l’intervention du médecin-conseil a été utile pour adapter un traitement dans l’intérêt du patient, ou pour réduire le coût de son traitement sans lui nuire.
De nombreux sondés estiment être trop souvent sollicités par les médecins-conseil des assurances pour justifier des traitements, et la moitié considèrent que ces demandes ne sont pas toujours compréhensibles.
Certaines caisses maladie pratiqueraient les refus de principe, suivies de discussions "chronophages" sur le bien-fondé du traitement, qui finiraient par aboutir à la prise en charge de la prestation dans plus d’un quart des cas.
Disparités entre les caisses maladie
Selon l'étude, il existerait d'importantes disparités difficilement explicables entre les caisses maladie au niveau des remboursements, certaines opposant un refus systématique non motivé à certains types de traitement, d’autres encore demandant de justifier le même chaque année.
Pour la plupart des médecins sondés, le rôle du médecin-conseil pourrait être utile s’il avait un contact direct avec le médecin traitant, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Sept sondés sur dix déplorent ainsi de ne même pas connaître le nom du médecin-conseil - certaines caisses maladie refuseraient de le communiquer - et une majorité le trouvent difficile à atteindre.
Les généralistes interrogés s’étonnent encore de recevoir des courriers signés par du personnel administratif de la caisse maladie, et non par le médecin-conseil en personne, ce qui pose la question du secret médical.
Le sondage sera mené au niveau romand
Face à ce constat qu'elle juge "accablant et assez général", la Société vaudoise de médecine (SVM) prévoit de mener le même sondage à l'échelle de la Suisse romande. Elle appelle aussi à revoir de fond en comble la fonction du médecin-conseil, en le dissociant des caisses maladie.
Pauline Turuban
"Pas de bonus chez les médecins-conseil"
Cité dans le Courrier du médecin vaudois, le président de la Société suisse des médecins-conseil et médecins d'assurances (SSMC), le Dr Jürg Zollikofer, répond aux reproches qui ressortent du sondage, notamment en ce qui concerne les doutes quant à l'indépendance des médecins-conseil.
Il affirme qu'au nom de l’article 57 de la LAMal, "les médecins-conseils évaluent les cas en toute indépendance" et que "ni les assureurs, ni les fournisseurs de prestations, ni leurs fédérations ne peuvent leur donner de directives". Le président de la SSMC ajoute que les honoraires fondés sur le résultat de l’exercice annuel de l’assureur sont interdits, et qu'il n'y a donc pas de bonus chez les médecins-conseil.
En ce qui concerne les différences d'appréciations sur des cas apparemment similaires, le Dr Jürg Zollikofer rappelle que "la liberté de thérapie est accordée au prestataire" et qu"aucun cas n’est tout à fait identique, même s’il a l’air semblable à un autre".