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Assurance chômage: Röstigraben à toutes les sauces

Les quotidiens soulignent les divergences entre Suisse romande et alémanique.
Les quotidiens soulignent les divergences entre Suisse romande et alémanique.
Le Röstigraben se mange à toutes les sauces dans la presse ce lundi, les quotidiens revenant très largement sur la scission provoquée dimanche par l'acceptation de la révision de la loi sur l'assurance chômage. Chaque titre y va de son explication, de la "contamination française" de la Suisse romande exposée dans Le Matin au "complexe de vulnérabilité" des Romands tel qu'analysé dans Le Temps. La vision divergente entre Suisse alémanique et Romandie est en tous les cas soulignée par tous les journaux.

Le Röstigraben fait jaser les gazettes

Le mot s'épelle en version alémanique dans les gazettes, à l'exception du Courrier qui ose parler d'une révision au "fort goût de Rösti." Sinon, le Röstigraben fleurit et les explications aussi. Il est mis en exergue dans Le Matin. On le doit au libéral-radical Christian Lüscher. Pour le Genevois, "il y a une contamination française qui influence le vote des Romands, c'est l'idée que l'Etat nous doit tout". Analyse que ne semble pas partager l'universitaire lausannois René Knüsel dans Le Temps, pour qui la différence de mentalité entre Romands et Alémaniques ne se résume pas au rapport à l'Etat. Le fossé sur l'assurance chômage tient surtout au complexe de vulnérabilité qu'entretient la Suisse romande. L'acceptation du rôle de l'Etat est différente. Toutes ses interventions dans la sphère privée, qu'il s'agisse d'aide sociale mais aussi de lutte contre la violence conjugale ou la maltraitance des enfants, sont vues avec beaucoup de réticences en Suisse alémanique. L'organisation de l'administration est différente: en Suisse alémanique, ce sont surtout les communes qui s'occupent de l'aide sociale, alors qu'en Suisse romande, ce sont plutôt les cantons. Cela induit un rapport totalement différent que l'aide soit versée par un fonctionnaire ou un édile du village. Ce ne sont pas seulement les mentalités, mais les structures qui sont différentes. Quand vous êtes érigés en minorité au sein d'un Etat, le fait de pouvoir solliciter la solidarité du "grand frère" quel qu'il soit est tout à fait central. C'est ce qui doit nous interpeller dans ce vote, affirme René Knüsel. Les Romands ont besoin d'une garantie de cette solidarité. Ils vivent dans la crainte d'une minorité vis-à-vis du majoritaire, celle de se voir réduire ses ressources sans pouvoir faire autre chose que subir. C'est une relation qui reste extrêmement délicate.

Visions divergentes

Le fossé qui sépare Alémaniques et Romands n'a jamais été aussi profond depuis 2004 et le vote sur l'assurance maternité, constate la Neue Luzerner Zeitung. Et le journal tente d'expliquer à ses lecteurs de Suisse centrale le "non" des Latins. Le refus des Welches et des Tessinois s'explique par la situation économique, écrit le quotidien. Mais il y a aussi, entre Romands et Alémaniques, des différences fondamentales d'approche de l'Etat et du travail. De ce côté-ci de la Sarine, nous attendons une assistance de l'Etat en cas de coup dur. C'est ce qui explique que les chômeurs romands restent en moyenne sept semaines de plus au chômage que leurs homologues alémaniques. En tout cas, ce "oui" réjouit Doris Leuthard, à l'interview dans ce même journal. Elle espère que ce résultat positif aidera Didier Burkhalter à faire accepter la très contestée 11e révision de l'AVS. Le fossé entre Romands et Alémaniques n'est pas visible uniquement dans le domaine des assurances sociales. Il l'est également dans le domaine du droit de vote des étrangers, constate la Berner Zeitung après le refus des Bernois et des Bâlois de deux initiatives allant dans ce sens. Bâle, pourtant, se gargarise de sa politique d'intégration exemplaire, écrit le Tages-Anzeiger. Et le commentateur de la Berner Zeitung de faire le récit d'un échec annoncé. Dans le climat actuel, le peuple n'est pas prêt à voter le droit de vote pour les étrangers. Par contre, conclut-il, il faut désormais alléger la procédure de naturalisation.

Tragédie shakespearienne au Labour

Des airs shakespeariens pour une tragédie familiale: allusion incontournable lorsqu'il s'agit de décrire le parcours politique des deux frères Miliband engagés dans la course à la présidence du parti travailliste britannique, remportée par le cadet Ed grâce à l'aide des syndicats face à son aîné David. Tragédie familiale, écrit Stéphane Bussard dans Le Temps, qui est apparue comme un condensé des divisions parfois violentes qui ont secoué le Labour au cours de ses treize années au pouvoir.

L'Allemagne frappée d'ostalgie

Cette semaine, les Allemands célèbrent les 20 ans de la réunification. Mais la nostalgie de la RDA  - ou ostalgie - s'empare de certains anciens citoyens du pays des paysans et des travailleurs. Une nostalgie tellement forte qu'elle se transforme même parfois en regrets. C'est le cas d'Egon Krenz, 73 ans, le dernier président de la RDA qui depuis la côte de la Baltique regrette le bon temps, rapporte le correspondant du Tages-Anzeiger à Berlin. Egon Krenz a été reconnu responsable des tirs de l'armée contre des citoyens est-allemands qui voulaient passer à l'Ouest. A la clé, trois années de prison durant lesquelles il a eu tout loisir de penser au passé. Et pour lui, cela sonne comme une évidence: le pays socialiste avait ses bons côtés que la nouvelle Allemagne n'offre plus. Un entêtement pour se protéger lui-même, disent certains. Egon Krenz, conclut notre confrère, est aujourd'hui le leader de tous ces patriotes d'un Etat naufragé, une sorte de dictateur d'un exil intellectuel.

bkel avec Jean-François Moulin et Stéphane Deleury/RSR

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