Depuis sa sortie fin octobre, Red Dead Redemption 2 triomphe auprès des gamers. Le premier week-end, il a engendré plus de 700 millions de dollars et a conquis la critique, séduite par le souci du détail de cette superproduction western.
Dans ce jeu vidéo, le gamer évolue sous les traits d'Arthur Morgan, un renégat qui fuit vers l'Ouest, en sillonnant durant des dizaines d'heures de vastes paysages d'une Amérique qui bascule dans l'industrialisation. Et se retrouve à sauver un enfant, ou s'il le désire, assister à une cérémonie du Ku Klux Klan, voire tabasser une suffragette.
Car ce blockbuster s'inscrit dans un "open world", soit un monde où la liberté d'action est totale ou presque. "On peut observer une cérémonie du Ku Klux Klan, détourner le regard ou en abattre les membres", confirme au 19h30 Selim Krichane, chercheur au GameLab de l'Université de Lausanne.
"Cela fait partie de cette stratégie qui vise à indiquer au joueur ou à la joueuse qu'il a le choix, et une partie du plaisir du jeu vient de ce sentiment de liberté", ajoute-t-il.
Une violence controversée
A l'image de précédents jeux de Rockstar Games, créateur des "Grand Theft Auto", ces éléments du dernier né du studio ont suscité la controverse. Le jeu reprend pourtant des formules bien établies dans le monde du gaming et récompense davantage les joueurs honorables que ceux qui se comportent comme des malfrats.
"L'honneur et les points d'honneur sont valorisés", explique Selim Krichane. "Il s'agit donc d'une forme de pénalisation de ceux qui vont contre la loi."
Mais la violence conserve une place importante. "Même si on peut choisir de ne pas être l'exécutant de certaines scènes violentes, on est parfois obligé d'être confronté à une forme de violence qui est mise en scène de manière assez réaliste", précise Niels Weber, psychologue spécialisé en hyperconnectivité et lui-même joueur. Une violence contextualisée qui doit être interprétée, notamment auprès des plus jeunes, même si le jeu vise un public adulte.
De la "mélancolie masculine blanche"?
Autre élément parfois soulevé, le jeu prend le parti de suivre des conquérants, des hommes blancs, plutôt que les minorités. Un chercheur a même parlé de "mélancolie masculine blanche" pour cette superproduction.
Les Indiens, les Afro-Américains et les femmes ne sont toutefois pas absents. "Le jeu thématise les questions d'inégalité, de race ou de genre", détaille Selim Krichane. "Par exemple, certains dialogues parlent explicitement des conditions de vie compliquées des Indiens dans les réserves."
Par ailleurs, tous ces codes typiques du western, représentant l'homme blanc en tant que pionnier, permettent de mobiliser un imaginaire culturel dont tous les joueurs ont plus ou moins conscience, explique le chercheur. De quoi rendre le jeu plus lisible, le gamer sachant plus facilement quelles actions sont autorisées. Et de quoi faire voyager les passionnés de western en attendant le mode multi-joueurs, prévu pour fin novembre.
Texte web de Tamara Muncanovic
Reportage TV de Julie Conti