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Les loups suisses sont très loin d'être "à moitié chiens", affirme une étude

Les surveillants vaudois de la faune ont abattu un premier loup de la meute du Marchairuz, dans le canton de Vaud (Image d'illustration) [WWF/GIANCARLO MANCORI]
Les loups suisses ne sont pas des chiens / CQFD / 7 min. / le 16 janvier 2019
Moins de 2% des loups détectés dans les Alpes suisses ces vingt dernières années sont issus d'hybridations avec leurs cousins les chiens. Leur intégrité génétique est restée intacte lors de la recolonisation des Alpes, selon une étude lausannoise.

Même si, à la vue d'un caniche ou d'un Yorkshire, le constat semble saugrenu, les chiens sont des loups sauvages que l'être humain a domestiqués il y a 10'000 à 30'000 ans. Ces animaux appartiennent à la même espèce (Canis lupus) au sein de la famille des canidés et sont issus d'un même ancêtre commun.

Tout au long de leur histoire, ils se sont parfois croisés et continuent à le faire, donnant naissance à des descendants fertiles. Eradiqué des Alpes à la fin du XIXe siècle, le loup y est réapparu naturellement au milieu des années 1990 en provenance des Apennins, en Italie.

Seulement deux spécimens hybridés

Dans une étude parue dans la revue Scientific Reports, l'équipe du Laboratoire de biologie de la conservation (LBC) du Département d'écologie et évolution (DEE) de l'Université de Lausanne a quantifié l'étendue de ce métissage. Une première en Suisse et dans les Alpes.

Les chercheurs ont constaté que seuls 2 des 115 loups qu'ils ont détectés par le biais d'analyses génétiques dans les Alpes suisses entre 1998 et 2017 montrent des signes de croisement avec des chiens au cours de générations passées.

"Il n'existe aucun critère morphologique diagnostique permettant de distinguer de façon fiable un loup d'un chien, et même les approches génétiques, infiniment plus puissantes, ne sont pas absolues. En effet, l'ADN des loups et des chiens est pratiquement identique et il n'existe pas de gènes exclusifs à l'un ou l'autre des deux animaux, explique Luca Fumagalli, maître d'enseignement et de recherche au DEE, invité de l'émission CQFD mercredi.

Rétrocroisement

"La seule analyse qui puisse être effectuée est le calcul du pourcentage de chances qu'un individu appartienne à l'un des deux groupes", complète Christophe Dufresnes, collaborateur au LBC et premier auteur de la publication.

Des analyses complémentaires montrent en outre que les deux hybrides (un mâle et une femelle) sont très certainement le fruit d'un rétrocroisement. Autrement dit, un de leurs deux parents était un loup et l'autre un croisement ou un descendant d'un croisement entre une femelle loup et un mâle chien.

>> Voir les explications de Christophe Dufresnes dans le 12h45 :

Loups des Alpes suisses: une étude confirme que les hybridations sont très rares. Les explications de Christophe Dufresnes.
Loups des Alpes suisses: une étude confirme que les hybridations sont très rares. Les explications de Christophe Dufresnes. / 12h45 / 1 min. / le 16 janvier 2019

Polémique liée à la conservation du loup

Aujourd'hui, la question du métissage, pourtant naturel, entre louves et chiens fait l'objet de vives polémiques et constitue un enjeu important des débats liés à la politique de conservation du loup.

"Elle est utilisée par certains comme argument pour autoriser l'élimination des animaux. Le loup est en effet strictement protégé, mais un flou juridique existe autour des spécimens hybrides", indique Luca Fumagalli, du Département d'écologie et évolution de l'Université de Lausanne (UNIL).

"De manière générale, les législations nationales recommandent leur suppression pour préserver l'intégrité des populations sauvages. Or la vraie question devrait plutôt être celle du contrôle de la présence de chiens errants transmettant leurs gènes aux loups", note le spécialiste.

>> Pour Raphaël Arlettaz, spécialiste du loup, "c'est surtout la victoire de l'évidence scientifique face au sens commun". :

Raphaël Arlettaz, biologiste "C'est surtout la victoire de l'évidence scientifique face au sens commun."
Raphaël Arlettaz, biologiste "C'est surtout la victoire de l'évidence scientifique face au sens commun." / 19h30 / 2 min. / le 16 janvier 2019

ats/az/kkub

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