Les chercheurs du Centre hospitalier universitaire vaudois
(CHUV) à Lausanne ont posé des électrodes sur la tête de 24
personnes, douze hommes et douze femmes, et leur ont présenté des
photos d'aliments et d'ustensiles de cuisine. Au rythme d'une
demi-seconde par image, ils avaient pour consigne de distinguer
entre ces deux catégories en appuyant sur le bouton ad hoc.
Une pizza n'est pas une poire
Mais en fait, à l'insu de leurs cobayes, les scientifiques
analysaient par électro-encéphalographie (EEG) la réaction du
cerveau à deux types de photos d'aliments, riches en graisses ou
pauvres en graisses.
Constat: pizza, chocolat ou croissant ne produisent pas le même
effet qu'une poire, un morceau de pastèque ou des épinards. Et ce,
même lorsque les sujets sont occupés à faire autre chose. Pas faim
«Le cerveau distingue automatiquement les catégories
d'aliments.
De plus, il le fait très précocement, utilisant un réseau
distribué entre les aires qui traitent les aspects visuels et
celles qui traitent leur valeur et prennent les décisions. Et tout
cela se passe même si la personne n'a pas faim», a expliqué le Dr
Micah Murray, directeur adjoint du EEG Brain Mapping Core du CIBM
et auteur de l'étude.
En bonne santé
En effet, lors des tests, les volontaires avaient préalablement
pris un repas. Il s'agissait en outre de personnes en bonne santé,
avec un indice de masse corporelle normal. Les scientifiques ont
constaté que les images d'aliments riches en graisses produisaient
dans le cerveau des réactions de plus forte amplitude.
En outre, les zones touchées étaient différentes. Parmi celles-ci
figurent principalement le cortex visuel, qui contribue à la
reconnaissance des objets, le cortex préfrontal, siège des
processus de décision, et l'aire ventrale-frontale, impliquée dans
le système de récompense.
L'étude des chercheurs, à laquelle le Centre de recherche Nestlé à
Lausanne a également participé, sera publiée dans la revue
«Neuroimage» du 1er février prochain.
ats/cht
Désordres alimentaires
D'autres études ont démontré que le cortex préfrontal est également impliqué dans les désordres alimentaires. Dès lors, on pourrait imaginer que des dysfonctionnements au niveau du cortex préfrontal ou d'aires de plus bas niveau soient impliqués dans la boulimie ou l'anorexie, note le Dr Murray.
Des études supplémentaires sont nécessaires dans ce domaine, estime le chercheur, qui évoque également celui des troubles de l'alimentation chez les personnes âgées. L'objectif étant «d'aider les patients individuels à mieux lire les informations de leur propre cerveau».
Meilleure prévention
De manière plus générale, «avoir un cerveau qui analyse vite la valeur énergétique des aliments est un avantage en termes d'évolution», souligne le Dr Murray.
Cette perception, ainsi que celle de leur saveur, sont des éléments influençant de manière déterminante les comportements alimentaires.
Comprendre les mécanismes cérébraux impliqués dans ces processus permettrait de mieux prévenir obésité, diabète et hypertension, concluent les chercheurs.