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Pas si innocents, les émojis peuvent être portés devant les tribunaux

Les tribunaux ne savent pas toujours comment interpréter les emojis qui apparaissent sur des pièces à conviction. [Keystone - Arno Burgi]
Les tribunaux empruntés face aux emojis / Tout un monde / 3 min. / le 1 mars 2019
Les émojis font leur apparition sur des pièces à conviction dans les tribunaux. La justice doit s’adapter et interpréter ces petits symboles ludiques comme de potentielles preuves, dans les cas de harcèlement notamment.

L’utilisateur a plus de choix que jamais en termes d’émoticônes. Un pouce levé, un visage heureux et autres simples images ponctuent les messages du quotidien sur les réseaux sociaux. A tel point qu'en 2017, plus de deux milliards d'entre eux ont été envoyés avec un émoji.

Mais, "plus on les utilise, plus le corpus d’éléments pouvant être utilisés au tribunal augmente", explique Eric Goldman, un professeur de droit californien. Selon son étude, des émojis ont été cités dans au moins 53 affaires aux Etats-Unis l’année dernière. C'est vingt fois plus qu'en 2017. Un cas est souvent cité: celui d’un proxénète présumé dans la région de San Francisco qui a envoyé à une femme un message avec des talons et un sac d’argent, ce qui confirmait selon l’accusation qu’il était bien un proxénète.

Sens multiples

Les fameux pictogrammes constituent des éléments supplémentaires versés au dossier judiciaire. Ils reviennent d'ailleurs régulièrement dans les affaires de prédateurs sexuels qui communiquent en ligne avec leurs victimes ou encore dans des cas de discrimination ou de harcèlement sexuel.

Une fois les messages arrivés dans les mains des juges, le rôle de ces derniers n'est pas simple, car le sens des émojis varie selon la génération, le pays et surtout le téléphone. Un iphone et un smartphone Android ne représentent pas forcément leurs symboles de la même manière. "Des cas comme ceux-là seront durs pour les tribunaux parce que personne n’a rien fait de mal, détaille le professeur de droit. Tout le monde a agi avec raison. C’est la technologie qui a altéré leur communication."

Responsabiliser les entreprises

Le professeur de droit suggère aux plateformes de rappeler à leurs usagers que les émojis ne sont pas toujours identiques. Pas de psychose à avoir, cependant. Après tout, chaque parole ou acte peut déjà être potentiellement porté devant les juges.

"Les émojis sont amusants et j'espère que les gens continueront à les utiliser, qu'ils ne se laissent pas impressionner par le risque légal", conclut Eric Goldman.

Loïc Pialat/ani

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