"Actuellement, un quart de la population mondiale porte la maladie, et parmi ces gens, 10% vont développer la maladie chaque année", explique Lucica Ditiu, directrice du partenariat de l'ONU Stop TB, qui coordonne la lutte sur le plan international entre 1500 organisations gouvernementales, ONG et groupes de patients, dans l'émission Tout un monde de la RTS.
Cette semaine se tenait à Lyon une conférence du Fonds mondial contre le paludisme, le sida et la tuberculose. Les chefs d'Etat et de gouvernement se sont engagés à augmenter le financement de la lutte contre ces trois maladies. Le directeur du Fonds Peter Sands a avancé jeudi le montant de 14,02 milliards de dollars de promesses de dons, ce qui correspond aux objectifs fixés.
La tuberculose, en particulier, est une maladie que l'on pense parfois oubliée. Pourtant, depuis 2016, elle est la maladie infectieuse la plus meurtrière de la planète, dont l'une des principales causes est la malnutrition. Au total, en 2016, plus de 10 millions de personnes ont contracté la maladie et 1,7 million en sont mortes dans le monde.
10% des porteurs développent la maladie chaque année
Et un pays recense à lui tout seul un quart des cas de tuberculose dans le monde: l'Inde. L'an dernier, 2,150 millions personnes ont été traitées pour cette maladie, mais le ministère de la santé estime que plus de 500'000 cas supplémentaires n’ont jamais été détectés. D'après l'Organisation mondiale de la santé, l'Indonésie, la Chine, les Philippines, le Nigéria, le Pakistan et l'Afrique du Sud représentent avec l'Inde 64% des cas dans le monde.
Mais si plus de 95% des décès dus à la tuberculose surviennent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, cette maladie infectieuse n'est pas absente du reste de la planète.
Actuellement, un quart de la population mondiale porte la maladie, et parmi ces gens, 10% vont développer la maladie chaque année.
"Personne n'imagine qu'on peut la contracter en France, en Suisse, en Allemagne ou aux Etats-Unis. Et pourtant, elle est là. Elle se transmet par l'air, comme n'importe quelle grippe. Des études récentes montrent que le simple fait de voyager quelques heures en avion ou de stationner dans un endroit bondé peut suffire à vous infecter (...)", relève Lucica Ditiu.
"Il y a un problème de sécurité sanitaire, surtout qu'une forme multirésistante de la maladie circule en Europe, où elle est très courante, bien plus qu'ailleurs", précise-t-elle.
Les autorités indiennes montent au front
Les autorités indiennes sont donc lancées dans une course pour réduire l'impact de la tuberculose et lutter contre la forme multiréisistante, sur laquelle les antibiotiques traditionnels n'ont pas d'effet. L'espoir est récemment venu de nouveaux médicaments, et les associations font tout pour que les patients puissent y avoir accès.
"Le gouvernement indien offre par exemple une aide alimentaire de 500 roupies par mois à chaque patient. Nous inspectons aussi systématiquement les malades du sida, car ils sont très vulnérables à cette contagion: même s'ils ne sont pas malades, nous leur offrons un traitement préventif contre la tuberculose", explique Kuldeep Singh Sachdeva, directeur adjoint du programme national contre la tuberculose.
Adaptation web: Jessica Vial
Ce reportage a été financé par le Centre européen de journalisme (EJC) via son programme de bourse dédiée à la santé mondiale Global Health Journalism GrantProgramme for France.
Pas assez de moyens
La vaccination est-elle une priorité pour mettre à terme à l'épidémie de tuberculose, l'un des objectifs de l'OMS d'ici 2030? "Non. Nous avons un vaccin, très utile quand on l'administre à la naissance, dans des pays avec grosses épidémies de tuberculose, notamment l'Inde, mais il ne vous immunise pas pour la vie. Les auditeurs en Europe ont peut-être été vaccinés il y a des années et ils se croient protégés, mais nous ne le sommes plus du tout après l'âge de 5 ou 6 ans", répond Lucica Ditiu, la directrice de Stop TB.
"La prévention est une chose, mais le dépistage précoce et le traitement des gens malades sont très importants pour prévenir l'essor de la maladie", souligne-t-elle.
Selon Lucica Ditiu, il manque "un milliard de francs pour la recherche et six milliards pour la mise en oeuvre". Et le point sensible, à ses yeux, ce sont les outils scientifiques à disposition. "Ce que nous avons pour battre la tuberculose, c'est pathétique. C'est comme si nous communiquions avec des signaux de fumée. Notre outil principal, c'est encore le microscope. Les traitements ont 50 ou 60 ans, à l'exception des quelques nouveaux médicaments et notre vaccin, qui a un siècle, ne fonctionne pas vraiment", déplore-t-elle.
Son interview complète dans l'émission Tout un monde:
Propos recueillis par Eric Guevara-Frey