Les fourmis ont une organisation politique ultra-sophisitiquée. Pour une même espèce, certaines colonies fonctionnent avec une seule reine, alors que d'autres en ont 100.
Ces différents types de hiérarchie sont adaptés à différents types d'environnement, et influent par exemple sur la taille des reines ou le niveau d'agressivité des ouvrières, selon qu'elles ont une seule monarque à défendre ou qu'elles en ont plusieurs de rechange.
Des gènes collés ensemble
Or d'après deux études publiées en janvier par l'Université de Lausanne dans "Current Biology" et "Nature Ecology and Evolution", cette mécanique de précision est déterminée par ce qu'on appelle des supergènes.
"Un supergène, c'est un groupe de gènes qui sont liés sur un chromosome", explique Laurent Keller, du Département d'écologie et d'évolution. "En principe, les gènes se séparent lorsque l'on fait des bébés, parce qu'il y a ce que l'on appelle la recombinaison: les chromosomes se cassent et se recollent avec un chromosome homologue. Au cours des générations, les gènes se transmettent de manière indépendante. Un supergène, au contraire, est lui constitué de gènes collés ensemble."
Contrôle de la variation des gènes
Chez les fourmis de feu, ce sont environ 600 gènes - 60% d'un chromosome - qui sont liés et transmis ensemble depuis des centaines de milliers d'années.
"L'avantage, c'est que ça permet de contrôler la variation des gènes, avec un gène qui va peut-être influencer le comportement et un autre gène qui va influencer autre chose", poursuit Laurent Keller. Cela permet d'assurer la transmission du mode d'emploi génétique de systèmes aussi sophistiqués que ceux de ces fourmis.
Ces constats poussent à se demander ce qu'il en est chez l'être humain, même si on n'a pas vraiment identifié de supergènes dans notre ADN. Une chose est sûre: en terme d'organisation sociale, les fourmis ont des dizaines de millions d'années d'avance sur nous.
Lucia Sillig/asch