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Sida: prévention et accès aux soins urgents

Les femmes et l'Afrique sont les plus touchées par le sida
Les femmes et l'Afrique sont les plus touchées par le sida
La 16e conférence mondiale sur le sida à Toronto a appelé cette semaine à accentuer d'urgence les programmes de prévention dans le monde, les progrès dans l'accès aux traitements étant insuffisants pour combattre l'épidémie.

"Nous avons mieux pris conscience à cette conférence que le
choix n'est pas entre l'un et l'autre", a souligné vendredi le
directeur général par interim de l'Organisation mondiale de la
santé (OMS), Anders Nordström. "Des millions de personnes sont
mortes, faute de l'un comme de l'autre".

2,8 millions encore en 2005

Près de 40 millions de personnes vivent avec le virus du sida
dans le monde, dont 95% dans les pays pauvres. Dans ces pays, 1,6
million de malades recevaient un traitement antirétroviral fin
juin, soit 24% de ceux en ayant un besoin urgent, selon l'OMS. Pour
la première fois, le nombre de malades sous traitement en Afrique
subsaharienne a dépassé le million, soit un décuplement de l'accès
aux soins dans la région depuis 2003.



Sur l'ensemble des pays "à faible et moyen revenu" l'augmentation
est de 24% en six mois. Par rapport à 2003, ce chiffre a quadruplé.
Un effort considérable, qui devra s'accélérer. Selon l'Onusida,
l'agence des Nations unies qui coordonne la lutte contre
l'épidémie, quelque 55 milliards de dollars devront être investis
d'ici 2008 pour se rapprocher de l'objectif d'une couverture
universelle.

Donner le pouvoir aux femmes

Les puissants cocktails antirétroviraux ont changé la donne,
permettant à des millions de personnes de continuer leur vie. Et si
la pandémie continue de s'étendre au rythme actuel (4,1 millions de
nouvelles contaminations en 2005), avait averti le philanthrope
américain Bill Gates en ouvrant la conférence, le financement des
traitements deviendra intenable "à l'horizon de cinq ou dix
ans".



"Nous devons travailler beaucoup plus activement à la prévention"
et donner pour ce faire aux femmes "le pouvoir de bloquer le VIH",
avait affirmé Bill Gates, acclamé par des milliers de délégués.
"Peu importe où elle vit, qui elle est ou ce qu'elle fait, une
femme ne doit jamais dépendre de la permission de son partenaire
pour sauver sa propre vie".

Espoirs médicaux au féminin

Les femmes sont les principales laissées pour compte de la
prévention avec, par ricochet, les enfants. Elles comptent
aujourd'hui pour près de la moitié des humains infectés par le
virus VIH, et même 60% en Afrique australe.



"Le message principal de la conférence, c'est que les femmes en
ont assez", estime Stuart Gillespie, chercheur à l'Institut
international de recherche en politique alimentaire (IFPRI).



Parmi les grands espoirs des femmes, les gels vaginaux
microbicides qui bloqueraient la transmission du virus et leur
donneraient la possibilité de réduire le risque sans devoir en
référer à leur partenaire sexuel. Mais il va falloir attendre au
plus tôt 2009, si les essais cliniques en cours donnent
satisfaction.

Toxicomanes préoccupants

Autre nécessité brûlante : celle d'un changement rapide de
politique vis-à-vis des toxicomanes dans les pays d'Europe de l'est
et d'Asie centrale, notamment en Russie et en Chine. Les
utilisateurs de drogues injectables constituent 70% des personnes
infectées dans ces pays mais ne représentent que 24% des malades
qui bénéficient d'un traitement, selon l'Onusida.

Trahison du G8?

L'envoyé spécial de l'Onu pour le sida en Afrique Stephen Lewis
a accusé vendredi les pays riches du G8 de "trahir le Sud" en ne
tenant pas leurs promesses de financement de la lutte contre
l'épidémie.



"Personne ne demande davantage que ce qui a été promis" lors du
sommet du G8 il y a un an à Gleneagles (Ecosse). "Mais la trahison
pavlovienne du Sud par les pays riches a déjà commencé", a lancé M.
Lewis sous les acclamations de milliers de délégués réunis pour la
cérémonie de clôture de la conférence internationale sur le sida à
Toronto (Canada).



Les sept pays les plus riches de la planète et la Russie s'étaient
engagés en juillet 2005 à fournir aux malades africains du sida un
"accès aussi universel que possible à un traitement pour ceux qui
en ont besoin" d'ici à 2010.



Agences/tac

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Femmes oubliées de la prévention

Les femmes représentent les deux tiers des contaminations chez les 15-24 ans. La féminisation de l'épidémie entraîne avec elle la contamination des enfants.

6% seulement des séropositives ont accès aux prophylaxies antirétrovirales qui empêchent la transmission au moment de l'accouchement.

L'épidémie tue 500'000 enfants par an. Plus de 2,3 millions d'enfants de moins de 15 ans vivent avec le virus du sida, en quasi totalité dans les pays pauvres. Un sur deux n'atteint pas son deuxième anniversaire.

Petites phrases et grandes déclarations

Les coups de colère et les témoignages poignants ont été nombreux cette semaine à la 16e conférence mondiale sur le sida. Voici quelques extraits:

"90% des médicaments sont au nord, alors que 90% des patients sont au sud." Julio Montaner, professeur spécialiste de la recherche sur le sida à l'Université de British Columbia (Canada).

"Le sexe, c'est plaisant. Les rapports protégés ne doivent pas être obligatoirement ennuyeux". Wendy Kerr, du Pleasure Project (le "Projet Plaisir"), qui promeut le plaisir dans l'amour avec préservatif.

"Le mariage est trop souvent un permis de faire ce que vous voulez de votre femme." Nafis Sadik, envoyée spéciale de l'Onu pour le sida en Asie.

"J'ai commis beaucoup d'erreurs quand j'étais président, mais pas celle-là." Bill Clinton, rejetant une accusation selon laquelle il n'aurait pas agi suffisamment contre le sida quand il était à la Maison Blanche.

"Aujourd'hui, le sida en Amérique est une maladie de noirs... C'est une crise sans précédent, une crise qu'on aurait dû voir venir." Phill Wilson, directeur du Black AIDS Institute, sur l'étendue de la maladie chez les noirs américains.

"Quand vous travaillez sur le sida, vous voyez le meilleur et le pire de l'être humain. Vous voyez les pires rejets, les préjugés et même les meurtres, et même le déni et le refus d'affronter cela." Peter Piot, directeur de l'Onusida.