«Nous avons le regret d'annoncer qu'il a refusé d'accepter la
médaille», a déclaré un porte-parole du Congrès mondial des
mathématiciens qui s'est ouvert à Madrid avec la cérémonie de
remise de ces médailles par le roi Juan Carlos.
L'énigmatique savant russe, qui a trouvé une solution au fameux
problème mathématique dit de la «conjecture de Poincaré», n'était
pas présent mardi. Il avait laissé prévoir ce refus dans une
interview au magazine américain «The New Yorker», où il qualifiait
cette récompense de «sans intérêt».
Auréole de mystère
Le savant de Saint-Pétersbourg a pratiquement coupé tout contact
avec ses pairs après avoir présenté sur internet en 2003 une
solution au complexe problème de topographie, formulé en 1904 par
le mathématicien français Henri Poincaré et qui passionne depuis
plus de 100 ans les spécialistes.
Une auréole de mystère plane depuis sur ce «génie» de 40 ans, qui
se serait retiré loin des hommes dans sa région natale de Saint
Pétersbourg. Mais ce n'est pas la première fois qu'il refuse les
honneurs. En 1996, il se paye le luxe de refuser le prix du Congrès
européen des mathématiciens au motif, selon la presse russe, que le
jury n'est pas compétent.
Prime d'un million non réclamée
Et il n'a pas encore réclamé le prix d'un million de dollars
promis pour la résolution de l'énigme de Poincarré, en omettant de
publier ses travaux dans une revue internationale comme le veut
l'usage.
Les trois autres lauréats sont le Français Wendelin Werner,
l'Australien Terence Tao et un autre Russe, Andrei Okounkov. Ils
ont reçu ce prestigieux prix à l'ouverture à Madrid du 25e Congrès
international des Mathématiques (CIM), qui réunit jusqu'au 30 août
quelque 3500 mathématiciens à Madrid.
Décernée tous les quatre ans
La Médaille Fields, du nom du mathématicien canadien John
Charles Fields, représente la plus haute distinction existant dans
la branche. Elle est distribuée depuis 1936, tous les quatre ans, à
des chercheurs de moins de 40 ans. Au total, 48 scientifiques ont
désormais été honorés. On ne compte aucun Suisse parmi eux.
Par ailleurs, le prix Nevanlinna, pour des travaux liés à la
Société de l'Information, a été octroyé à l'Américain Jon Kleinberg
et le Prix Gauss, nouvellement créé et qui consacre les
applications en mathématiques, au Japonais Kiyoshi Ito.a été
ouverte.
agences/jab
La conjecture de Poincaré, une énigme vieille de 100 ans
Pour comprendre le principe de la conjecture de Poincaré, il suffit de prendre une pomme, de mettre autour d'elle un ruban et de le faire glisser sur sa surface jusqu'à ce qu'il soit comprimé. En faisant glisser le ruban tout doucement, on finit par le comprimer en un seul point.
En revanche, si l'on met le ruban sur un anneau, il est impossible d'en réduire la longueur, sans couper le ruban ou l'anneau, de réduire donc ce ruban juste par glissement et compression.
En langage mathématique, on dit que la sphère - une pomme, une balle ou une bulle ou encore la Terre - est une surface simplement connexe, alors que l'anneau ne l'est pas.
La conjecture fut formulée par Henri Poincaré dans les termes suivants: "Considérons une variété compacte V à trois dimensions sans bord. Est-il possible que le groupe fondamental de V soit trivial bien que V ne soit pas homéomorphe à une sphère de dimension 3?"
En géométrie, la variété est un espace abstrait ou topologique, construit par association et déformation d'autres espaces simples, et elle est compacte lorsqu'elle est fermée, l'homéomorphisme étant le lien entre deux sphères qui permet de passer de l'une à l'autre par une déformation continue.
Une déformation continue, c'est ce qu'on peut faire avec une boule de pâte à modeler, sans la couper en deux. Mais en tirer une formule mathématique est une autre paire de manches.