Dans le laboratoire de recherche du département Immunologie de l'Université de Berne, il n'y a aucune place pour le doute. Son responsable, Martin Bachmann, a l'ambition de vacciner la population suisse contre le covid-19 dès le mois d'octobre, grâce à l'injection d'un virus synthétique non infectieux pour l'homme.
"Nous sommes parmi les meilleurs groupes de recherche. Nous travaillons dans un consortium avec l'Hôpital de l'Ile, l'Université de Berne et l'hôpital universitaire de Zurich. En même temps, nous avons une équipe qui travaille à Riga, en Lettonie, et nous collaborons avec la Haute école des sciences de la vie de Wädenswil (ZH) pour fabriquer le vaccin. C'est une grosse équipe, et pas juste un petit groupe qui tente de le faire."
Rattraper le retard
Pour l'heure, des tests sur des souris ont montré des résultats prometteurs au niveau immunitaire, mais d'autres laboratoires sont plus avancés. L'Université d'Oxford, par exemple, a déjà administré un vaccin potentiel jeudi dernier sur des patients.
Le professeur d'immunologie ne craint pas pour autant d'être en retard: "On voit souvent que le premier qui s'élance dans une course n'arrive pas forcément le premier. Nous avons prévu en août les études cliniques et après huit semaines, nous pourrons les étendre à toute la Suisse. Cela signifie que l'on pourra rattraper notre retard", avance le professeur.
A condition aussi de lever 100 millions de francs dans le privé, pour achever le développement du vaccin.
Les autorités sanitaires fédérales ne font pas de commentaires sur le potentiel de cette recherche. L'Office fédéral de la santé publique indique seulement qu'il figure parmi quatre projets de vaccins suisses suivis de près par un groupe d'experts de la Confédération. En témoigne notamment la visite du conseiller fédéral Alain Berset il y a 10 jours.
Un projet parmi beaucoup d'autres
Quant à l'Organisation mondiale de la santé, elle recense plus de 80 vaccins en cours de développement, avec de bonnes chances d'aboutir rapidement.
Selon Sylvie Briand, directrice du département pandémies et épidémies à l'OMS, la rapidité annoncée par le laboratoire bernois n'est pas "déraisonnable": "Le mois d'octobre est un objectif, mais on ne va pas faire une vaccination de masse dès l'automne. Cela va être d'abord proposé à des petits groupes de gens pour en vérifier l'innocuité", précise-t-elle.
L'experte rappelle que durant la pandémie de grippe A(H1N1) en 2009, le développement d'un vaccin avait débuté au mois d'avril pour obtenir la première dose en automne.
Les gros progrès de la vaccinologie
De nouvelles technologies et méthodes pour concevoir des vaccins ont été mises en place ces dernières années, permettant une plus grande rapidité de réaction face aux maladies. "Tout cela peut révolutionner la vaccinologie dans les années à venir en ayant différentes souches pour obtenir une meilleure immunité", conclut Sylvie Briand.
Aujourd'hui plus que jamais, la rapidité est d'autant plus importante que l'enjeu sanitaire et financier est énorme. Plus de 3 milliards de personnes sont confinées chez elles et attendent un vaccin.
Gabriel de Weck/fme