Au-delà des simples oublis ou d'une difficulté à s'en procurer, il existe des refus volontaires, bien plus déterminés. Particulièrement radicaux aux États-Unis, notamment, où les plus récalcitrants font parfois preuve d'un rejet véhément, injurieux voire menaçant, ces comportements existent également en Suisse.
Parmi les raisons invoquées, on entend parler pêle-mêle de respect de la liberté individuelle, qui serait bafouée par l'imposition du masque ; du fait que la maladie ne serait "pas si dangereuse" ; ou encore d’une prétendue dangerosité du masque lui-même.
Sentiment de supériorité
Or, ces arguments ne reposent sur aucune légitimité factuelle. Mais il existe toutefois des motivations sous-jacentes qui expliquent ces actes de petites rébellions. La psycho-sociologue Dominique Picard y voit le reflet d'un sentiment de supériorité, une volonté de se sentir au-dessus des autres, de ne pas "suivre le troupeau sans réfléchir".
"Il y a la volonté de dire 'moi, je prends mes responsabilités'. Mais dans cette situation, "c'est aussi une règle de solidarité que l'on viole", estime-t-elle, "c'est exprimer aussi qu'on se fout des autres".
Un avis sévère mais partagé notamment par le président de la Royal Society de Londres et prix Nobel de chimie Venki Ramakrishnan, qui a comparé l'aspect antisocial du refus de porter le masque au fait de conduire après avoir bu de l'alcool.
L'obligation pas forcément efficace
Panteleimon Giannakopoulos, professeur de psychiatrie à l’Université de Genève, abonde en ce sens: "Ce n'est pas un mécanisme qui est propre aux masques, c'est un rapport général que l'on a vis-à-vis de la majorité" qui peut concerner différents aspects de la vie quotidienne, notamment "une série de limitations sociétales qui peuvent avoir parfois un rapport avec la morale, parfois un rapport à la notion de protection".
Selon ce dernier, ce type de comportement est intrinsèque à toute société. "Dans tous les systèmes, si vous imposez aux gens de sortir avec un costume rouge, il y aura quelqu'un qui sortira avec un costume bleu", conclut-il.
Et si le seul antidote est l'imposition de force, cette stratégie radicale ne permettrait que de diminuer les violations des normes sans pour autant faire disparaître leur rejet.
Katja Schaer/jop