Donald Trump fait main basse sur l'antiviral Remdesivir, sans inquiéter la Suisse
Le Remdesivir est le seul antiviral à avoir montré des signes d'efficacité chez les patients hospitalisés pour une pneumonie sévère à cause du Covid-19. Une étude américaine sur 1000 patients, fin mai, montrait une diminution de quatre jours d'hospitalisation.
L'administration de Donald Trump vient de sécuriser un accord pour acheter 500'000 doses, soit la quasi-totalité de la production jusqu'à fin septembre du fabricant américain Gilead. Cette annonce a fait grincer des dents à l'international.
En Suisse, les autorités ne se disent pas inquiètes: "Pour le moment, les Etats-Unis ont un peu fait main basse sur le Remdesivir. Mais nous avons actuellement des échanges avec l'entreprise qui fabrique ce médicament et nous avons bon espoir de pouvoir le mettre à disposition de la population suisse", affirme Stefan Kuster, responsable des maladies transmissibles à l'Office fédéral de la santé publique (OFSP).
Pénurie en cas de 2e vague
Yann Hulmann, porte-parole de l'OFSP, précise que la Suisse est en contact avec l'entreprise depuis le début de la pandémie: "Déjà lors de la première vague, la Suisse avait obtenu une quantité suffisamment importante de ce médicament pour traiter les patients. Il n'est pas inutile de souligner que le Remdesivir n'est indiqué que dans les cas graves."
Le Remdesivir fait l'objet d'une autorisation provisoire en Suisse. Les hôpitaux universitaires romands disposent de doses servant aux essais cliniques lancés par Gilead et par l'OMS, avec la possibilité de les utiliser en dehors de ces études. De quoi couvrir plusieurs semaines, car le nombre de malades est bas. Mais en cas de deuxième vague, l'approvisionnement pourrait poser problème.
Fabriquer des génériques
"Gilead a des capacités de production limitées. S'il existe un besoin accru dans l'Union européenne ou l'Europe, il sera difficile de satisfaire la demande de tous les Etats", redoute Valérie Junod, professeure en droit pharmaceutique aux universités de Genève et de Lausanne.
Mais le scénario d'une bataille entre Etats pour obtenir ces molécules est peu probable, juge l'experte. "Si la Suisse a des problèmes d'approvisionnement, elle peut toujours obliger l'entreprise à donner son brevet pour fabriquer un générique dans son pays".
Collaborer avec l'UE
Gilead a d'ailleurs déjà cédé des licences à certains pays, comme l'Inde. Mais la fabrication prend au moins six mois. La Suisse aurait donc intérêt à collaborer avec l'Union européenne, estime Valérie Junod: "Je préconiserais une entente globale entre européens pour être sûrs que les besoins sont satisfaits là où ils sont élevés. Ce n'est pas raisonnable de constituer un stock pour la Suisse s'il n'y a pas de deuxième vague".
En parallèle, les recherches sur cette molécule continuent. Pour l'heure, aucun effet concluant n'a encore été démontré sur la mortalité. Les prochains résultats sont attendus dans les semaines à venir.
Aurélie Coulon/fme