Les sécheresses consécutives des trois derniers étés inquiètent en Suisse et partout en Europe. L'une des difficultés de la recherche, c’est que la science ne peut analyser concrètement les conséquences des phénomènes climatiques sur les arbres que des années plus tard.
En France, l’Office national des forêts (OFN) a fait de la forêt de Vierzon, à 200 km au sud de Paris, une "forêt pilote". Particulièrement vulnérable aux changements climatiques en raison de son sol, la forêt de Vierzon permet de voir de façon accélérée ce qui peut se passer dans les forêts européennes dans les prochaines années. Cette expérience grandeur nature doit aider à imaginer et à construire la forêt du futur, résiliente aux aléas climatiques.
"Les arbres continuent de mourir, c’est comme un goutte-à-goutte. C’est un phénomène qui est constant", témoigne Alexis Hachette, responsable territorial ONF, samedi dans le 12h45.
S'inspirer des arbres qui s'adaptent
La forêt fond comme un glaçon, par le haut, car c’est au départ la cime qui s’assèche. Selon ce forestier, l’arbre du futur sera plus petit et trapu. "On va sans doute aller vers des arbres qui seront moins hauts, à qui on va donner plus de place au niveau aérien et au niveau racinaire", décrit-il.
Depuis 15 ans, la parcelle-test de la forêt de Vierzon est laissée sans intervention humaine. Les arbres sont seuls face au climat. Les survivants seront des modèles pour inventer une forêt résiliente.
"Ceux qui auront résisté vont manifester des capacités à s’adapter qui nous intéressent au plus haut point", explique Alexis Hachette. "Cela donnera la possibilité de prélever des graines pour faire des plantons, avant de les planter. Ou alors de les cloner."
La biodiversité, clé de la résilience
Pour comprendre le phénomène, on modélise en laboratoire le comportement des arbres en fonction des changements climatiques. La forêt du futur doit mêler des essences très diverses, selon Nicolas Viovy, chercheur au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement à Paris-Sarclay.
"La biodiversité offre une meilleure résilience à tous les effets de la sécheresse, parce qu’on a des complémentarités", indique-t-il. "On peut par exemple planter des arbres qui ont des racines très profondes avec des arbres qui ont des racines plus superficielles, ce qui permet de mieux utiliser toute l’eau qu'il y a à l'intérieur du sol."
Retour vers le futur?
À la forêt de Vierzon, on ne plante pas des espèces venues du sud. On a décidé plutôt d’en réintroduire, comme ce séquoia, courant ici il y a plusieurs millions d’années.
"Cet arbre est un ancien européen, mais qui nous revient d’Amérique où il a survécu aux glaciations. On en retrouve des fossiles en Europe, notamment dans les carrières", expose Alexis Hachette.
Le forestier en a déjà planté un l’année dernière. Il a l’avantage de capter beaucoup de carbone, et grandit très vite.
Adeline Percept/kkub