Selon une récente étude germano-britannique publiée en 2007,
plus d'un joueur régulier sur dix montre des signes de
dépendance.
Même si ces pratiques excessives concernent davantage l'Asie, où
la culture du jeu en ligne est très développée, les experts
considèrent en France comme en Allemagne que 1 à 2% des joueurs de
"jeux en ligne massivement multi-joueurs" (MMOG), des jeux de
simulation sans fin, ont une pratique de nature pathologique, avec
un impact négatif sur leur vie sociale.
"Toujours mieux que de fumer du cannabis"
Selon nombre d'experts, le critère pour évaluer une pratique
pathologique de jeux en ligne n'est pas tant le nombre d'heures
(lire encadré) mais bien la rupture du lien social dans la
réalité.
"Contrairement aux formes de dépendance liées à des substances, la
dépendance aux jeux en ligne est reconnue dans la société comme une
faiblesse morale mais non pas comme une maladie", souligne Jakob
Hein, responsable du service d'addictologie à l'hôpital La Charité
à Berlin.
Pourtant cette dépendance "entraîne des problèmes similaires dans
les familles comme dans l'économie" et mériterait que les autorités
la traitent "sur le même plan" que les autres en termes de
prévention et d'intervention, selon lui.
En Allemagne, le diagnostic de dépendance aux jeux n'est pas
reconnu par les caisses d'assurance maladie, et les centres de
thérapie spécialisés se comptent sur les doigts d'une main. Dans
son cabinet, ce psychiatre allemand entend des parents dire
"préférer voir leur progéniture jouer sur internet plutôt que de
fumer du cannabis".
Pallier à un déficit social
Cette dépendance comportementale, qui s'installe peu à peu, est
révélatrice de certains malaises (échec scolaire, manque de
valorisation de soi etc...). Dans un monde parallèle, les joueurs
trouvent un entourage social virtuel, des règles claires et un
système de récompense et de sanctions qui leur fait défaut au
quotidien.
Le phénomène ne concerne pas seulement les adolescents mais aussi
les cadres, pères et mères de famille ou les personnes âgées, selon
Laurent Baup, juriste au Forum des droits sur internet.
Quand faut-il tirer la sonnette d'alarme? "Dès le moment où on
commence à s'interroger, c'est qu'on aurait dû réagir depuis
longtemps", estime le psychiatre Jakob Hein. Ironie du sort, c'est
souvent sur les plateformes internet que les parents de joueurs
dépendants cherchent conseils et soutien.
afp/ant
Du virtuel 40 heures par semaine
En moyenne, les joueurs invétérés s'adonnent 35 à 40 heures par semaine aux jeux en ligne, selon des estimations.
En France, près de 60% des joueurs reconnaissent cependant avoir déjà joué une fois au moins pendant dix heures d'affilée et 5% déclarent passer plus de 30h par semaine dans le monde virtuel, selon une étude récente du "Forum des droits sur l'internet", organisme français de régulation de l'internet.
On reste généralement loin toutefois des 50 heures d'affilée ayant coûté la vie à un joueur compulsif sud-coréen de 28 ans dans un cybercafé en 2005.
Les jeux de rôle sont les plus risqués
Selon les spécialistes, ce ne sont ni les jeux d'action ni les jeux de réflexion mais bien les jeux de simulation, en particulier les jeux de rôle multi-joueurs qui comportent le plus de risques de dérive addictive.
Ces jeux continuent à évoluer en l'absence du joueur qui a alors le sentiment d'être en manque lorsqu'il n'est plus connecté ou exclu par le reste de la communauté de joueurs.
"World of Warcraft", l'un des jeux les plus susceptibles de créer de la dépendance, compte plus de 9,3 millions d'abonnés dans le monde.