"Nous avons été constamment surpris car Mercure ne s'est pas
révélée être la planète que nous attendions en étant totalement
différente de notre Lune", a dit mercredi devant la presse Sean
Solomon, de la Carnegie Institution, le principal scientifique de
la mission.
"C'est au contraire une planète très dynamique où il se passe
énormément de choses", a-t-il ajouté en référence aux activités
volcaniques et à la magnétosphère de Mercure.
Alors que Mercure ressemble à première vue à la Lune avec de
nombreux cratères grêlant sa surface rocheuse, cette planète est en
fait très différente, insiste ce scientifique en présentant avec
plusieurs autres membres de la mission les premiers résultats de la
moisson d'informations et d'images collectés.
"Ce survol nous a permis de voir une partie de la planète qu'aucun
engin spatial n'avait vue auparavant et d'obtenir (...) une mine
d'informations passionnantes", a souligné Sean Solomon.
Une nouvelle facette fascinante
Quelque 55% de la surface n'avait jamais été observée
jusqu'alors. Messenger (Mercury Surface, Space Environment,
Geochemistry and Ranging) s'était approchée le 14 janvier à près de
200 kilomètres de la surface de Mercure, marquant le premier survol
depuis 1975 de la planète la plus proche du soleil.
Mariner 10 avait été le premier engin à s'approcher de Mercure à
trois reprises en 1974 et 1975 mais à chaque passage, la planète
présentait la même face au Soleil.
Les sept instruments de Messenger ont permis de montrer une
topographie des cratères et autres formations géologiques de la
partie jusque-là cachée de Mercure.
Ils montrent que la planète la plus proche du soleil, dont le
diamètre n'est qu'un tiers de celui de la Terre, a des falaises de
plusieurs centaines de kilomètres de long formées apparemment par
le mouvement des plaques tectoniques au début de son
histoire.
Sa surface est aussi marquée par de nombreux cratères ayant
résulté d'impacts très anciens d'astéroïdes et aussi probablement
de volcans. Messenger a pu aussi photographier des bassins de plus
de 2'000 mètres de profondeur ainsi que des montagnes culminant à
près de 5'000 mètres et également des plaines.
Un millier d'images
Quelques-unes des 1'213 photos prises par la sonde Messenger et
dévoilées mercredi accréditent la thèse selon laquelle d'anciens
volcans parsèment Mercure et selon laquelle la planète rétrécit à
mesure qu'elle vieillit, ce qui laisse apparaître comme des stries
à sa surface.
Mais d'autres clichés sont surprenants et laissent perplexes. On a
souvent pensé que Mercure, la planète la plus proche du soleil,
était au soleil ce que la lune est à la Terre: un astre morne, où
dominent le noir et le blanc.
Mais ces nouvelles photos qui donnent à voir des parties de
Mercure encore jamais observées par un oeil humain, montrent une
planète plus colorée que l'idée que l'on s'en faisait.
Elles montrent aussi que Mercure a eu par le passé une activité
volcanique. "Il y a des zones d'un bleu et d'un rouge très
subtiles", s'est étonnée la scientifique Louise Prockter de
l'Université Johns Hopkins, qui a supervisé la mission Messenger
pour la NASA.
agences/hoj
L'araignée dans le cratère
Messenger a notamment découvert une formation géologique présentant des caractéristiques très inhabituelles que les scientifiques de la mission ont baptisée "The Spider" (l'araignée).
"Cette formation géologique a un cratère (de 41 kilomètres de circonférence) près de son centre mais il est impossible de déterminer s'il est lié ou non à cette formation ou s'il s'est formé ultérieurement", a souligné James Head, un des membres de l'équipe scientifique et professeur à l'université Brown (Rhode Island, est).
"The Spider" est aussi formé d'une centaine de tranchées étroites irradiant d'un point central telles les pattes d'une araignée, d'où le nom retenu par les scientifiques de la mission pour cette formation géologique qui "constitue un véritable mystère" selon Louise Prockter du laboratoire de physique appliquée de l'Université Johns Hopkins.
"The Spider" se trouve au centre du bassin Caloris de Mercure formé il y a près de quatre milliards d'années par l'impact d'un énorme astéroïde.
Selon les instruments de Messenger, le diamètre de ce bassin atteindrait près de 1'600 kilomètres, soit beaucoup plus que l'estimation faite à partir des données recueillies par Mariner 10 en 1975.
Outre le passage rapproché en janvier, Messenger en fera deux autres, en octobre 2008 et en septembre 2009, avant de revenir se mettre sur orbite de Mercure en mars 2011.
La sonde avait été lancée le 3 août 2004.