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Le nucléaire, une énergie "durable", selon une expertise de l'UE

La centrale nucléaire du Bugey, près de Lyon. [Keystone - AP Photo/Laurent Cipriani]
La centrale nucléaire du Bugey, près de Lyon. - [Keystone - AP Photo/Laurent Cipriani]
Des expertes et experts de l'UE préconisent d'inclure le nucléaire dans une liste d'investissements "durables" respectueux du climat que Bruxelles est en train d'établir: un scandale pour des ONG environnementales mais un succès pour la France, qui en fait un cheval de bataille.

En juin 2019, un groupe d'expertise sur la finance durable concluait que l'énergie nucléaire, qui n'émet pratiquement pas de CO2, pouvait "contribuer à atténuer le changement climatique" – mais sans conclure sur ses dommages environnementaux potentiels.

La Commission européenne a chargé son service scientifique (Centre commun de recherche, CCR) de déterminer si l'atome pouvait intégrer sa liste des énergies considérées comme vertueuses à la fois pour le climat et l'environnement ("taxonomie verte"), susceptible d'en faciliter le financement.

Comparable à l'hydroélectrique

Dans leur rapport rendu fin mars, expertes et experts du CCR estiment qu'"aucune analyse ne fournit de preuves scientifiques que l'énergie nucléaire porte atteinte à la santé humaine ou à l'environnement davantage que les autres énergies" incluses dans la taxonomie.

"Si l'on considère les effets non-radiologiques, les impacts de l'énergie nucléaire sont essentiellement comparables à l'hydroélectrique et aux énergies renouvelables", précisent ces spécialistes. Quant aux effets radioactifs, "des mesures prévenant les impacts nocifs ou limitant leurs conséquences peuvent être établies, avec les technologies actuelles, à coût raisonnable".

Probabilité d'accident "extrêmement basse"

Enfin, l'enfouissement géologique des déchets nucléaires est un "moyen approprié et sûr" de les isoler efficacement, même si les technologies nécessaires "n'ont jamais été expérimentées sur le long terme", faute de site opérationnel en Europe.

Si les accidents nucléaires graves "ne peuvent être exclus à 100%", ils restent d'"une probabilité extrêmement basse".

"Stupéfiant", selon Greenpeace

Pour l'ONG Greenpeace, cette expertise se fonde sur des "hypothèses en contradiction avec la réalité, sur les coûts et délais de construction de centrales, le soi-disant +recyclage+ des déchets, la faisabilité et l'impact du stockage".

"Dire que le nucléaire a le même impact que les énergies renouvelables, effets radioactifs mis à part, c'est stupéfiant (...) Le problème majeur, c'est précisément les risques radioactifs associés au démantèlement de centrales, aux déchets, aux dangers d'explosion", observe Sébastien Godinot, expert du WWF.

L'organisation dénonce aussi un CCR "structurellement pro-nucléaire", en raison de sa proximité avec les industriels, via des partenariats de formation, des plateformes de recherche, ou la coordination du traité Euratom destiné à doper l'atome civil.

>> Réécouter le sujet sur le projet du Japon de rejeter dans la mer l'eau radioactive de Fukushima :

Vue aérienne de la centrale nucléaire de Fukushima, où les citernes d'eau sont stockées. [AFP - STR / Jiji Press]AFP - STR / Jiji Press
Le Japon rejette de l'eau de Fukushima dans l'océan, / La Matinale / 1 min. / le 13 avril 2021

Un rapport encore étudié

L'avis du CCR n'entraîne pas automatiquement la reconnaissance du nucléaire comme énergie durable: son rapport sera révisé par des experts en radioprotection et gestion des déchets nucléaires, puis par un comité scientifique de la Commission chargé de la santé et de l'environnement.

Il devra se prononcer sous trois mois, avant que l'exécutif européen ne tranche. La "taxonomie" proposée pourra être rejetée par les eurodéputées et eurodéputés ou une majorité d'Etats membres.

afp/lan

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Des membres de l'UE divisés

Les Etats de l'UE apparaissent divisés: si l'Allemagne ou l'Autriche sont opposés au nucléaire, la France et la Pologne, notamment, multiplient les déclarations de soutien.

"La France se battra pour que le nucléaire soit considéré comme une énergie décarbonnée (...) indispensable au succès de la lutte contre le réchauffement climatique (...) C'est un combat politique", a déclaré jeudi le ministre de l'Economie Bruno Le Maire.

Les pays pro-nucléaires y voient une solution bas carbone pour atteindre leurs objectifs climatiques: l'inclure dans la taxonomie les aiderait à financer de nouvelles centrales en accédant à la finance verte.