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Les capteurs de CO2 contre le Covid-19 font leur chemin, mais ne font pas l'unanimité

Covid-19: la Task Force encourage désormais l'usage de capteurs CO2 pour mesurer la qualité de l'air intérieur.
Covid-19: la Task Force encourage désormais l'usage de capteurs CO2 pour mesurer la qualité de l'air intérieur. / 19h30 / 2 min. / le 23 avril 2021
La task force scientifique de la Confédération recommande l'utilisation de capteurs de CO2 à l'intérieur des bâtiments, en particulier dans les salles de classe, pour lutter contre le coronavirus. Le canton de Vaud en a déjà équipé ses classes, mais certains n'y voient qu'un gadget.

Ces appareils permettraient notamment d'alerter lorsqu'il faut aérer un local ou sortir temporairement de la pièce. De cette manière, les capteurs pourraient réduire le risque de transmission par aérosol, ont indiqué les membre de la task force mardi via Twitter.

Les experts ajoutent que ces capteurs de CO2 sont simples d'usage et peu coûteux (entre 100 et 200 francs).

En effet, plus la concentration de gaz carbonique est faible, meilleure est la qualité de l'air. Si l'appareil affiche des valeurs qui dépassent les recommandations, cela signifie qu'il y a trop de gaz carbonique dans la salle et potentiellement des aérosols contaminés.

Les classes vaudoises déjà équipées

L'Etat de Vaud avait déjà mis ces capteurs à disposition des écoles avant la crise du coronavirus, afin d'encourager les bonnes pratiques.

Au collège de Montchoisi à Orbe (VD), Pierrick Weber, 15 ans, a été désigné responsable de la surveillance du capteur de sa classe: "Je m'occupe de demander aux élèves d'ouvrir les fenêtres au début pour aérer et pour qu'il y ait moins de C02. C'était déjà avant le Covid, pour que les élèves soient mieux en classe. Et puis on nous a dit que d'ouvrir les fenêtres, c'était encore mieux contre le virus", raconte-t-il au 19h30.

Le canton de Vaud avait suivi les recommandations de l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) au début de l'année 2020. Ces prescriptions faisaient suite à une enquête menée dans près d'une centaine de bâtiments scolaires dans tout le pays. Les conditions d'aération devaient être améliorées dans plus de deux tiers des salles de classe.

Dans le contexte épidémiologique actuel, l'Etat de Vaud fait donc figure de précurseur au regard du communiqué de la task force. Les experts souhaitent désormais le généraliser dans toute la Suisse. "L'utilisation de capteurs CO2 pourrait contribuer à maintenir les écoles ouvertes même lors d'une aggravation de la situation épidémiologique", argumentent les scientifiques.

"Un gadget"

Pour Didier Pittet, médecin-chef du Service prévention et contrôle des infections aux Hôpitaux universitaire de Genève (HUG), cet outil frise le gadget: "Oui, c'est important de bien aérer les pièces et les salles de classe, on le sait depuis des années. Ma maîtresse d'école enfantine ouvrait les fenêtres pendant la récréation et les refermait après. Donc si ces capteurs vous aident à vous rappeler qu'il faut ouvrir ou fermer les fenêtres, c'est très bien. Mais il ne faut pas prendre l'excuse du Covid", dit l'infectiologue.

Selon lui, il n'existe aucune étude qui mette en relation la quantité de CO2 dans une pièce avec le risque de transmission. "Il faut faire attention de ne pas être faussement rassuré par ces appareils. Maintenir les vraies mesures qui vont limiter la transmission, c'est-à-dire la distance sociale et l'hygiène des mains, c'est probablement là-dessus qu'il vaudrait mieux insister."

Quant à l'argument du prix négligeable, il n'est pas recevable, selon Didier Pittet, qui estime que lorsque ces capteurs seront installés dans toutes les écoles, ils coûteront tout de même beaucoup d'énergie.

Un indicateur

Les scientifiques de la task force considèrent, au contraire, que la concentration de CO2 peut être utilisée comme un indicateur indirect de la concentration des aérosols exhalés. Ces aérosols peuvent s'accumuler dans les espaces intérieurs mal ventilés, augmentant le risque de transmission du virus SARS-CoV-2.

"Quand je rentre dans une pièce, je ne peux pas savoir si elle est bien ventilée. Le capteur de CO2 n'est en rien quelque chose qui va garantir l'absence de risque de coronavirus", souligne Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale de l'université de Genève. Ce membre de la task force précise que le capteur de CO2 va garantir qu'il y a "un risque limité ou diminué, et c'est cela dont on a besoin aujourd'hui si l'on veut continuer à pouvoir ouvrir les écoles".

Feriel Mestiri, Gabriel de Weck

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