Superprédateur et menace pour la biodiversité, le silure colonise les lacs suisses
Le silure n'est pas un poisson comme les autres. Il peut dépasser les deux mètres de long et vivre jusqu'à 60 ans. En 2015, un spécimen de 2m25 et 80 kilos avait été pêché dans le lac de Morat. Cette véritable machine à tuer prend toujours plus de place dans les lacs suisses, ce qui n'est pas sans conséquence pour la biodiversité.
"C'est un superprédateur, il mange de tout, il est très opportuniste. Dans le Léman, il pourrait mettre en danger certaines populations qui se trouvent à faible profondeur", explique dans Forum Maxime Prevedello, membre du bureau directeur de la Fédération Suisse de Pêche.
Mangeur de pigeons
S'il ne représente aucun danger pour l'homme, ce poisson n'en est pas moins à la source de nombreuses légendes urbaines. Il y a notamment celle qui voudrait qu'il se nourrisse de petits chiens s'aventurant un peu trop au bord de la rive. Maxime Prevedello coupe court: "Je ne sais même pas si c'est déjà arrivé en Suisse."
Les silures foncent sur la grève, attrapent le pigeon par ses pattes et ne le relâchent plus pour ensuite l'avaler
Le pêcheur explique cependant que certains silures en Dordogne, dans le sud de la France, se sont spécialisés dans la chasse aux pigeons qui viennent s'ébrouer au bord de l'eau. "Les pigeons viennent nettoyer leurs plumes au bord de l'eau, et certains silures les attendent patiemment pour se précipiter sur eux."
"C'est un peu à l'image des orques qui se jettent sur les petits phoques qu'on voit dans les reportages. C'est un peu le même principe. Les silures foncent sur la grève, ils attrapent le pigeon par ses pattes et ne relâchent plus leur prise pour ensuite l'avaler."
Sommet de la chaîne alimentaire
Le silure est au sommet de la chaîne alimentaire de la faune lacustre. Il n'a aucun prédateur, et si certains cas de cannibalisme ont été avérés, cela ne suffit pas pour réguler l'espèce. La seule solution est donc de le pêcher davantage.
Les plus gros spécimens ne sont malheureusement pas toujours propres à la consommation, car il ont tendance à accumuler des polychlorobiphényles, aussi appelé PCB, qui sont des polluants organiques.
Un produit d'exportation?
Maxime Prevedello estime toutefois que les silures de petites tailles sont tout à fait comestibles. "Les spécimens qui font de 60 centimètres à un mètre sont des poissons relativement jeunes qu'on peut consommer, ne serait-ce que leur filet dorsal, qui est le filet le plus maigre."
Le directeur de la Fédération Suisse de Pêche y voit même un potentiel économique. Le silure est effet très apprécié dans les pays de l'Est, où il y a son bassin d'origine, le Danube. "On l'exploite beaucoup là-bas, à tel point qu'on pourrait prévoir des exportations vers ces pays, qui le consomment de manière intense."
Propos recueillis par Thibault Schaller
Version web: Antoine Schaub