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Face à la multiplication des débris spatiaux, une législation est nécessaire

La Station spatiale internationale en novembre 2021. [EPA/Keystone - NASA]
L’espace est-il trop encombré de satellites? / Tout un monde / 7 min. / le 3 janvier 2022
Récemment, la Chine a accusé Elon Musk de perturber l'espace. L'homme le plus riche du monde a déjà lancé une constellation de plus de 1500 satellites destinés à apporter une connexion à internet aux quatre coins du globe. Et il n'est pas le seul acteur sur ce marché. L'espace est-il trop encombré?

A leur lancement, les premiers satellites de Starlink (lire encadré), la société créée par Elon Musk, avaient déjà provoqué l'inquiétude des astronomes professionnels et amateurs. La lumière qu'ils réfléchissent menaçait l'observation des étoiles.

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Mais désormais, la constellation de satellites placée en orbite basse - à 550 kilomètres de la surface terrestre - et destinée à fournir une connexion internet dans des zones reculées, suscite aussi la colère de la Chine.

Deux manœuvres d'évitement

Selon un document adressé début décembre par Pékin au Bureau des affaires spatiales de l'ONU à Vienne, la station spatiale chinoise Tiangong a dû à deux reprises, en juillet et octobre, procéder à des manoeuvres d'évitement afin d'esquiver une "rencontre" avec des engins de SpaceX. La Chine a alors accusé les Etats-Unis de "manquer à leurs obligations internationales" dans l'espace.

"Elon Musk place ses stellites tout près de la Terre, car cela lui permet d'avoir des communications plus rapides et qui demandent moins d'énergie, ainsi que de pouvoir faire les choses le plus rapidement possible. Si tout le monde joue le même jeu à 300 km de la Terre, l'espace à disposition n'est quand même pas gigantesque", souligne Yaël Nazé, astrophysicienne à l'Université de Liège, lundi dans l'émission Tout un monde de la RTS.

>> Ecouter le podcast "Elon Musk va-t-il nous voler nos étoiles" :

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Elon Musk va-t-il nous voler nos étoiles? / Le Point J / 9 min. / le 14 mai 2020

Trois millions d'alertes en 2021

Le multimilliardaire canado-américain n'est pas le seul: plusieurs autres sociétés, notamment française et britannique, se sont lancées sur le marché, et d'autres sont sur les rangs.

"Au-dessus de nos têtes, il y a de plus en plus d'objets spatiaux: des satellites actifs, des vieux satellites, des vieux étages de fusées, tout ce qui a pu exploser, ainsi que tout ce qui a pu entrer en collision et générer des fragments supplémentaires", explique Christophe Bonnal, chercheur au CNES et président des commissions Débris spatiaux de l'Académie internationale d'astronautique.

En 2021, le centre d'orbitographie opérationnelle à Toulouse a reçu trois millions d'alertes de rapprochements dangereux, soit une toutes les 20 secondes

Christophe Bonnal, chercheur au CNES et président des commissions "Débris spatiaux" de l'Académie internationale d'astronautique

Selon Christophe Bonnal, le nombre d'alertes a en tout cas augmenté considérablement, même si le nombre d'accidents reste très faible: "En 2021, le centre d'orbitographie opérationnelle à Toulouse a reçu trois millions d'alertes de rapprochements dangereux (quand deux objets ou satellites se croisent à un ou quelques kilomètres, n.d.l.r.), soit une toutes les 20 secondes."

Peu réglementé

"L'espace est peu réglementé", estime Isabelle Sourbes-Verger, directrice de recherche au CNRS. "Vous ne connaissez pas forcément l'état de la situation spatiale, c'est à dire quels sont les satellites qui sont susceptibles de croiser votre orbite et à quel moment. (...) Il n'y a pas de 'règles de circulation'. Dès que vous avez une autorisation de tir, vous lancez votre satellite. Et l'Etat qui a lancé le satellite est responsable des dommages potentiels."

Actuellement, les agences spatiales poussent les fabricants à mieux gérer la fin de vie de leurs satellites. "Les satellites d'Elon Musk sont dotés d'une capacité de 'désorbitation'. Au moment où le satellite n'est plus opérationnel, on met en marche un petit moteur qui propulse le satellite pour qu'il redescende plus vite vers l'atmosphère et qu'il brûle sans encombrer l'orbite", décrit Isabelle Sourbes-Verger.

Les deux gros acteurs, la Chine et les Etats-Unis, doivent bouger si on veut aboutir à un traité international

Yaël Nazé, astrophysicienne à l'Université de Liège

L'espace est d'autant plus difficile à réglementer qu'il est traversé par des intérêts géostratégiques évidents. "Les deux gros acteurs, la Chine et les Etats-Unis, doivent bouger si on veut aboutir à un traité international", note Yaël Nazé. "Les Etats-Unis ont beaucoup laissé faire ces dernières années, parce qu'ils ont poussé très fort le privé, qui ne voulait absolument aucune règle. Et la Chine ne veut pas de règles qu'elle n'a pas choisies."

Héritage encombrant de la Guerre froide

La communauté spatiale travaille aussi à la définition commune d'une distance minimale de croisement des satellites. Sur plus de 36'000 objets de 10 centimètres ou plus, environ 3000 sont actifs, rappelle Christophe Bonnal, chercheur au CNES.

Selon lui, ce sont davantage les objets inertes hérités du passé que les satellites actuels qui posent problème: "Par exemple, nous avons tous les objets qui avaient été lancés durant la Guerre froide entre 1970 et 1980. Tout cela est là-haut, et non conforme aux réglementations qui sont venues bien après. Ces objets ne demandent qu'une chose: entrer en collision et générer de nouveaux débris. (...) Voilà notre problème aujourd'hui."

Plusieurs projets de robots munis de bras articulés et capables d'aller capturer des épaves sont actuellement à l'étude. Mais ces solutions coûtent cher et aucun pays n'est disposé à mettre seul la main au porte-monnaie pour récupérer de vieux satellites, d'autant que les opérateurs qui les avaient lancés n'existent plus. Dans l'espace, le principe du pollueur-payeur n'est donc toujours pas d'actualité.

Francesca Argiroffo/vajo avec agences

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Déjà plus de 1900 satellites Starlink dans l'espace

La constellation de satellites Starlink, est l'un des principaux projets d'Elon Musk, aux côtés des voitures électriques Tesla et des vols spatiaux de SpaceX. L'entreprise Starlink, destinée à fournir de l'internet à haut débit partout dans le monde, donne le tournis.

Depuis le premier lancement en 2019, environ 1900 satellites ont déjà été mis en orbite dans le cadre de ce programme. Les lancements ont lieu environ toutes les deux semaines à raison d'une cinquantaine d'appareils par tir. Le dernier en date a eu lieu le 18 décembre.

Rien qu'en 2021, Starlink a mis en orbite plus de 800 satellites, et prévoit d'atteindre, par étapes, les 12'000, puis les 42'000 objets en orbite.