Les restes d'Omo Kibish 1 ont été déterrés en 1967 par l'équipe du paléoanthropologue kényan Richard Leakey dans la basse vallée de l'Omo (sud de l'Ethiopie). Il s'agit du plus ancien fossile d'Homo sapiens connu d'Afrique de l'Est. Et même de tout le continent africain, avant d'être détrôné par la découverte en 2017 de restes d'Homo sapiens primitifs au Maroc, remontant à 300'000 ans.
A Omo 1, très difficile à dater en l'absence de dentition, on donna approximativement 130'000 ans. Une étude parue en 2005 est ensuite venue repousser le temps, à 195'000 ans, en se fondant sur l'analyse des sédiments environnants – marqueur chronologique beaucoup plus fiable en l'occurrence que la datation directe sur les os.
Mais "il restait encore beaucoup d'incertitude sur son âge", explique à l'AFP Céline Vidal, auteure principale d'une nouvelle étude publiée mercredi dans la revue Nature.
Cendres volcaniques
Cette volcanologue de l'Université de Cambridge est donc partie refouiller le bassin sédimentaire d'Omo Kibish, alimenté par la rivière Kibish. Située dans le Grand Rift, la zone fut en proie à de violentes éruptions volcaniques entre 300'000 et 60'000 ans avant notre ère.
Les cendres, projetées sur des centaines de kilomètres à la ronde, sont venues au fil du temps s'intercaler entre les sédiments déposés par la rivière Kibish.
C'est grâce à l'examen de ces différentes couches que les scientifiques ont pu évaluer l'âge des restes humains – par une méthode de datation, appelée "argon-argon", des gaz rares contenus dans les roches.
"La preuve la plus solide"
L'équipe de scientifiques a pu examiner la couche de cendres recouvrant les restes, et relier ces dépôts volcaniques à une explosion colossale du volcan Shala survenue il y a 233'000 ans. Ces analyses ont permis de dater les fossiles d'Omo sous cette couche, à environ "233'000 – avec une marge d'erreur de 22'000 ans", détaille l'étude.
"On se rapproche de la date avancée par la génétique, selon laquelle c'est aux alentours de 300'000 ans que l'homme moderne a divergé des autres lignées humaines", développe Aurélien Mounier, paléoanthropologue au Musée de l'Homme, l'un des auteurs de l'étude.
Omo 1 se rapproche aussi de l'âge des fossiles marocains de Jebel Irhoud – 300'000 ans également. Mais c'est le crâne éthiopien – avec ces caractéristiques morphologiques de l'homme moderne – qui, à ses yeux, constitue désormais "la preuve la plus solide de la présence la plus ancienne de Sapiens" dans l'ensemble de son berceau africain.
ats/gma