Le décompte de l'agence spatiale américaine inclut les découvertes rapportées dans des publications scientifiques à comité de lecture et dont les preuves proviennent de diverses observations indépendantes. Les 65 derniers mondes extrasolaires ont été ajoutés aux archives le 21 mars de cette année. Mais tout cela n'est qu'une minuscule fraction des mondes de notre galaxie qui pourraient se compter en centaines de milliards...
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Elle fait vraiment partie du passé, cette époque où les seules planètes connues en dehors de la nôtre se nommaient Mercure, Vénus, Mars, Jupiter, Saturne, Uranus, Neptune et Pluton – qui n'est plus qu'une "
" depuis août 2006.
Quelle étoile pour quelle planète?
Ce formidable voyage de découverte de planètes extrasolaires a commencé le 9 janvier 1992, avec les trois premières planètes identifiées autour d'un pulsar nommé PSR B1257+12, une étoile à neutrons qui tourne très vite sur elle-même, en émettant des flashs de rayonnement électromagnétique.
Si cette trouvaille des astronomes Alex Wolszczan et Dale Frail est moins connue que celle faite par les Suisses Michel Mayor et Didier Queloz – pour laquelle ils ont obtenu le prix Nobel de Physique en 2019 – c'est parce qu'elle tourne autour d'un pulsar: "C'est un corps céleste très exotique! Et nous, nous n'orbitons pas autour d'un pulsar", explique l'astrophysicienne Emeline Bolmont, professeure au département d'astronomie et directrice du Centre pour la vie dans l'Univers de l'Université de Genève. "Il n'y a pas beaucoup de futur dans cette voie-là. En cherchant des planètes autour d'une étoile comme la nôtre, il y a plus de possibilité d'habitabilité", note-t-elle par téléphone, jointe par RTSinfo.
C'est pourquoi l'Histoire et le Comité Nobel ont plutôt retenu 51 Pegasi b, la première exoplanète – une planète géante composée principalement de gaz – repérée orbitant très près d'une étoile de type solaire. La précision a donc son importance.
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Des mondes très variés
Parmi les 5000 mondes extraterrestres découverts à ce jour figurent de petites planètes rocheuses comme la Terre, des géantes gazeuses beaucoup plus grandes que Jupiter, mais aussi des super-Terres, des mini-Neptunes et des Jupiters-chauds qui orbitent très près de leur étoile. Il existe aussi des planètes tournant autour de deux étoiles en même temps ou s'obstinant à rester près des restes d'un soleil mort...
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En 2014, au début de sa carrière, Emeline Bolmont a participé à la découverte de l'exoplanète Kepler-186 f avec des collègues américains: "En étudiant les données récoltées, nous avons vu que cette planète était potentiellement habitable". Au fil du temps, les connaissances sur cette planète se sont affinées: "Son rayon a augmenté!", dit-elle en riant. "Elle est plus grande que ce qu'on pensait. Ce n'est peut-être pas une rocheuse, mais plutôt une mini-Neptune", précise la chercheuse. "Mais ce système est vraiment très loin [ndlr. 557,7 années-lumière], on ne peut pas faire d'autres mesures".
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Un système prometteur
Un système qui plaît particulièrement à Emeline Bolmont est celui de TRAPPIST-1, sept planètes orbitant autour d'une naine rouge, à peine plus grande que Jupiter, à 39,5 années-lumière: "Il y a trois planètes à peu près de la taille de la Terre qui sont dans cette fameuse zone habitable. Et les sept exoplanètes sont dans une configuration dynamique très particulière, commensurables, comme celle des satellites de Jupiter".
Cela s'appelle la commensurabilité des périodes des planètes ou encore une résonance orbitale: et la scientifique d'expliquer que quand Io fait quatre tours autour de Jupiter, Europe en fait deux et Ganymède en fait un. Une spécificité que possède le système TRAPPIST-1 qui peut être transposée musicalement!
(lire encadré)
Pour l'heure, chercheurs et chercheuses ne connaissent pas encore les atmosphères de ces planètes, mais espèrent en savoir plus grâce au télescope James Webb: "On a déjà une idée de la composition des planètes. C'est l'un des systèmes les mieux connus. Et, grâce aux télescopes Hubble et Spitzer, on sait qu'il n'y a pas de grosse atmosphère d'hydrogène: c'est bon signe, car cela veut dire que les atmosphères pourraient ressembler à la nôtre", remarque Emeline Bolmont.
"La prochaine grande étape dans le domaine des exoplanètes, c'est de caractériser les atmosphères (lire encadré). Une étape nécessaire pour, un jour, découvrir la vie... même si ce n'est pas facile de la détecter!"
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Stéphanie Jaquet avec l'ats
Une nouvelle ère pour les exoplanètes
Aujourd'hui, selon les spécialistes, une nouvelle ère s'ouvre dans la découverte des exoplanètes: le télescope spatial TESS (Transiting Exoplanet Survey Satellite) de la NASA, lancé en 2018, Hubble de la NASA et de l'Agence spatiale européenne (ESA), opérationnel depuis 1990, et CHEOPS (Characterising Exoplanets Satellite) de l'Université de Berne et l'ESA, à l'œuvre depuis 2019, seront bientôt aidés par une nouvelle génération d'appareils plus puissants et plus sensibles.
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Le plus attendu est le télescope spatial James Webb, fruit d'une collaboration internationale entre la NASA, l'ESA et l'Agence spatiale canadienne (ASC). Un bijou de technologie lancé fin 2021.
Le télescope Nancy Grace Roman de la NASA doit être mis en orbite en 2027 et mettra Hubble à la retraite, tandis que la mission ARIEL (Atmospheric Remote-sensing Infrared Exoplanet Large-Survey) de l'ESA, qui vise à étudier l'atmosphère des mondes extraterrestres, doit démarrer en 2029.
L'Observatoire de Genève développe également RISTRETTO (2023), un instrument qui permettra de définir l'atmosphère d'une exoplanète en analysant la lumière réfléchie par celle-ci.
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La mélodie de TRAPPIST-1
Les planètes TRAPPIST-1 ont des périodes orbitales qui sont de simples fractions les unes des autres. Cela signifie qu'elles sont presque synchronisées les unes avec les autres. Ou, dans le jargon scientifique, proches des commensurabilités.
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Cette disposition est pratique car elle permet aux scientifiques de mesurer leurs masses, à partir de leurs interactions relatives. Plus la commensurabilité est proche, plus les planètes sont susceptibles d'être en résonance, ce qui amplifie leurs interactions.
La synchronisation des orbites signifie que, sur une courte période, le schéma des transits reste très similaire; un schéma répété signifie qu'il y a un rythme et, donc de la musique. TRAPPIST-1 a une mélodie!
L'harmonie de tout un système
Daniel Tamayo et Matt Russo, deux chercheurs de l'Université de Toronto, ont aussi mis TRAPPIST-1 en musique. Ils le font pour d'autres objets du cosmos sur leur site System-sounds.com.
Ils expliquent comment la nature résonante des orbites permet de stabiliser le système aussi longtemps qu'il est possible de le calculer, et contribue également à créer une harmonie musicale.