Soul machines, Synthesia ou Hour one, ces entreprises sont à la pointe d'une technologie en plein essor: les humains numériques, hyperréalistes, qui parlent aux consommateurs ou aux spectateurs. Le secteur est en pleine expansion. Les investisseurs ne s'y trompent pas. Ces derniers mois, les nouveaux leaders du marché ont levé 200 millions de francs.
On connaissait déjà le deepfake, ces vidéos truquées très réalistes, réalisées grâce à l'intelligence artificielle, qui permettent de faire dire n'importe quoi à n'importe qui à des fins de désinformation ou de nuisance. Cette technologie a également un volet autorisé.
On parle ici d'avatars numériques créés pour des entreprises. Car les spots de publicité traditionnels sont souvent coûteux à produire. Il faut du matériel, de l'expérience et des acteurs. Mais, désormais, grâce à ces techniques basées sur le deep learning (apprentissage profond), elles peuvent transformer automatiquement, en un seul clic, un texte en vidéo.
Doublures de stars numériques
Un acteur a ainsi vendu son double virtuel. Comme une marionnette, il récite de façon crédible vos propos. C'est photoréaliste. On ne voit quasiment pas la différence avec un véritable acteur. Parmi les premiers à utiliser cette technologie, il y a l'école de langues Berlitz. Ici, l'avatar vous apprend à prononcer une phrase. Un avantage énorme, puisqu'il parle parfaitement toutes les langues.
Dans le même style, l'ancienne star du football David Beckham a tourné une vidéo pour lutter contre la malaria. Grâce aux algorithmes qui permettent de modifier les mouvements du visage, en une seule prise, il parle parfaitement neuf langues.
Il y a donc un intérêt économique pour les entreprises. Ces acteurs virtuels permettent de faire baisser les coûts de production et ouvrent aussi la voie à de nouveaux revenus. Un exemple: le studio Dreamworks et l'entreprise Cameo vous proposent d'acheter une vidéo personnalisée de leur héros Baby Boss, avec la voix synthétisée d'Alec Baldwin. Tout est dans la machine. La production de cette vidéo ne leur coûte quasiment rien.
Parler avec les robots
Mais désormais les grandes marques veulent aller plus loin avec des intelligences artificielles d'apparence humaine qui parlent directement avec les clients. Une sorte de chatbot 2.0.
Nestlé, pour sa marque Toll House, propose de discuter avec une cuisinière virtuelle. Elle vous aide à préparer vos cookies. Dans sa dernière démonstration, Soul Machine présente un astrologue qui vous livre un horoscope sur mesure.
Et ce n'est qu'un début, puisque désormais les développeurs préparent l'arrivée des clients dans le monde numérique permanent: le métavers. Ces avatars humains numériques pourront évoluer de façon autonome, interagir et répondre aux utilisateurs. C'est en tout cas la promesse. On pourra par exemple les trouver en vendeur dans les magasins virtuels. Et ils pourraient prendre les traits de célébrités.
Mais avant cela, il faudra régler des questions juridiques et éthiques. Est-ce qu'on pourra faire revivre les morts ou les faire travailler? Que va-t-il arriver à notre propre image ou notre voix dans cette éternité numérique? Quels statuts pour cette main-d'oeuvre numérique? On attend d'ici l'été une première décision du Parlement européen.
Pascal Wassmer