Les astronomes n'avaient pas eu de vue aussi nette de la planète la plus lointaine du Système solaire (lire encadré) depuis les images prises durant le bref et unique passage de la sonde Voyager 2 dans le voisinage de cette géante glacée en août 1989, à 5000 kilomètres au-dessus du sommet de ses nuages.
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"La vision infrarouge du télescope apporte une nouvelle façon d'analyser son atmosphère", a indiqué Mark McCaughrean, conseiller pour la science et l'exploration à l'agence spatiale européenne (ESA).
Le télescope élimine tout l'éblouissement dû à la réflexion du soleil sur la surface de Neptune et la pollution lumineuse de son environnement, de façon "à commencer à deviner la composition atmosphérique" de la planète, a expliqué l'astronome, qui a travaillé plus de 20 ans sur le projet du James Webb Space Telescope (JWST).
Une teinte colorisée
Neptune avait un aspect bleuté dans les images prises dans la gamme d'onde du visible par le télescope Hubble, à cause de la présence de méthane dans son atmosphère.
Avec l'instrument NIRCam du JWST, la planète prend une teinte colorisée dans un blanc grisé, car le méthane absorbe très fortement la lumière rouge et infrarouge. L'image montre aussi "une lumière étrange" à l'un des pôles de Neptune, a dit l'agence spatiale américaine dans un communiqué. Un vortex – déjà connu précédemment – est visible au pôle Sud et Webb, pour la première fois, révèle une bande continue de nuages à haute altitude qui l'entoure.
Les lunes de Neptune
Le télescope a aussi capturé l'image de sept des quatorze lunes connues de la planète, notamment de Triton, qui ressemble par son éclat à une petite étoile.
Plus importante que la planète naine Pluton, elle paraît aussi plus brillante que Neptune à cause de la réflexion de la lumière solaire sur sa surface de glace. Triton est le corps planétaire le plus froid connu dans le Système solaire, avec un "volcan" d'azote à sa surface.
Les astronomes qui cherchent des planètes en dehors de notre système solaire ont constaté que celles du genre de Neptune ou Uranus sont les plus répandues: "La capacité à observer celles-ci de près va faciliter l'observation des autres [géantes glacées, ndlr.] en orbite autour d'autres étoiles" que notre Soleil, a expliqué Mark McCaughrean.
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En service depuis juillet dernier, le JWST est le plus puissant télescope spatial jamais déployé. Il va permettre un genre d'astronomie "qui était impensable il y a encore cinq ans ", selon Mark McCaughrean.
Des études plus approfondies de Neptune et Triton par le télescope Webb sont planifiées en 2023.
Stéphanie Jaquet et les agences
Neptune, la géante de glace
Neptune, huitième et dernière planète de notre Système solaire, fascine les astronomes depuis sa découverte en 1846. Elle met 164 ans pour faire le tour du Soleil.
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Située à 4,3 milliards de kilomètres, soit 30 fois plus loin de notre astre que la Terre, elle orbite dans la région sombre et éloignée du Système solaire externe. À cette distance extrême, le Soleil est si petit et faible que midi sur Neptune est semblable à un crépuscule sombre sur Terre.
Cette planète est qualifiée de géante de glace en raison de la composition chimique de son intérieur. Comparée aux géantes gazeuses, Jupiter et Saturne, Neptune est beaucoup plus riche en éléments plus lourds que l'hydrogène et l'hélium. Cela est facilement visible dans l'apparence bleue caractéristique de Neptune aux longueurs d'onde visibles, causées par de petites quantités de méthane gazeux.