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Trop ou pas assez de motivation nuit à la prise de décision

Trop ou pas assez de motivation nuit à la prise de décision, selon une équipe de recherche lémanique qui a élaboré des expériences avec des souris assoiffées. [via AFP - Bruno Cavignaux/Biosphoto]
Trop de motivation nuit à la prise de décision, selon une étude / La Matinale / 1 min. / le 14 octobre 2022
Un niveau trop élevé ou au contraire trop bas de motivation peut dégrader nos ressentis et par conséquent nos prises de décision, selon une étude de chercheuses et chercheurs lémaniques. Ces travaux ouvrent de nouvelles perspectives dans les méthodes d'apprentissage, notamment.

Si le rôle de la motivation sur la performance dans les tâches comportementales est connu depuis plus d'un siècle grâce aux travaux des psychologues américains Robert Yerkes et John Dilligham Dodson, son effet précis sur le cerveau demeure peu clair, a indiqué jeudi l'Université de Genève (UNIGE) dans un communiqué.

Le profil de ce monticule, escaladé par la souris pour étancher sa soif, est à l’image de la courbe de la loi de Yerkes-Dodson, qui décrit la relation entre performance comportementale et motivation. La souris effectue cette tâche en s’aidant de ses moustaches, essentielles pour l’exploration du monde chez les rongeurs. [UNIGE - generated by Dall-e]
Le profil de ce monticule, escaladé par la souris pour étancher sa soif, est à l’image de la courbe de la loi de Yerkes-Dodson, qui décrit la relation entre performance comportementale et motivation. La souris effectue cette tâche en s’aidant de ses moustaches, essentielles pour l’exploration du monde chez les rongeurs. [UNIGE - generated by Dall-e]

Le laboratoire de Sami El-Boustani, professeur assistant au Département de neurosciences fondamentales de l'UNIGE, étudie précisément les circuits neuronaux impliqués dans ces mécanismes.

Dans ces travaux, menés en collaboration avec le laboratoire de Carl Petersen, de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), son équipe a tenté d'observer la manière dont les informations sensorielles transmises par les neurones du cortex sont modifiées par le degré de motivation et dans quelle mesure cette dernière peut avoir un effet sur l'apprentissage et la performance d'une tâche décisionnelle.

Pour ce faire, chercheuses et chercheurs ont mis au point un dispositif impliquant des souris en régime de consommation d'eau contrôlé. Ils ont tout d'abord entraîné les rongeurs à réagir à des stimuli tactiles via deux moustaches (A et B) et à produire une action – lécher un tube – uniquement pour la vibrisse A afin d'obtenir une goutte d'eau.

A la suite de cet apprentissage, ces souris réagissaient principalement à la stimulation de la vibrisse A, indiquant ainsi leur capacité à distinguer ces deux sensations. Ensuite, l'équipe de recherche a mené ces expériences à différents niveaux décroissants de soif, afin de faire varier la motivation des rongeurs.

L'hypermotivation brouille l'information

En état de grande soif – et donc de grande motivation – les rongeurs performaient mal. Ils léchaient le tube de manière indifférenciée, sans distinction des vibrisses stimulées, selon ces résultats publiés dans la revue Neuron.

En revanche, en état de soif modérée, la qualité de leur action devenait optimale. Ils léchaient principalement le tube lorsque la stimulation passait par la vibrisse A. Enfin, lorsque leur soif était peu importante, la qualité de la performance chutait à nouveau.

En observant chez ces souris l'activité des réseaux neuronaux responsables de la prise de décision, les chercheurs ont découvert que les neurones de ces circuits étaient submergés de signaux électriques lorsque les rongeurs étaient surmotivés. A l'inverse, en état de sous-motivation, les signaux étaient faibles.

Perte de précision

"L'hypermotivation entraîne une forte stimulation des neurones, ce qui provoque une perte de précision dans la perception de stimuli tactiles", indique Giulio Matteucci, post-doctorant du laboratoire de Sami El-Boustani et premier auteur de l'étude, cité dans le communiqué.

A l'inverse, en état de faible motivation, la précision de l'information sensorielle était conservée, mais le niveau des signaux était trop bas pour que celle-ci puisse être correctement transférée. Il en résultait, par conséquent, également une altération de la perception des stimuli.

"Nos résultats révèlent également que le niveau de motivation n'impacte pas uniquement la prise de décision mais la perception des informations sensorielles, préalables à celle-ci", explique Carl Petersen, professeur ordinaire au Brain Mind Institute de l'EPFL. Ce décryptage ouvre la voie à de nouvelles méthodes d'apprentissage adaptatives visant à maintenir un niveau de motivation optimal.

ats/sjaq

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