Jusqu'à aujourd'hui, pour calmer des tremblements, il existait soit des médicaments, soit la stimulation cérébrale profonde – des électrodes implantées dans le cerveau nécessitant une intervention neurochirurgicale lourde.
L'intérêt des ultrasons est qu'ils peuvent agir sur la zone qui génère les tremblements sans avoir besoin d'ouvrir le crâne du ou de la malade. Une quinzaine de personnes ont déjà reçu ce traitement avec des résultats très encourageants.
Plusieurs pathologies à tremblements
La neurologue Vanessa Fleury, responsable de l'unité des troubles du mouvement aux HUG, a mis cette technique en place à Genève avec ses collègues. Au micro de CQFD, elle explique ce qui se passe dans le cerveau d'une personne souffrant de tremblements: "La physiopathologie du tremblement reste en cours d'élucidation. Mais globalement, nous avons dans le cerveau des cellules qui vont décharger de façon répétitive et produire le tremblement".
Et en fonction de la pathologie, elles sont dans d'autres régions: "Par exemple, dans le Parkinson, ce sont les cellules qui sont dans les ganglions de la base, des noyaux gris dans la profondeur du cerveau. Ces cellules qui génèrent le tremblement vont déséquilibrer des réseaux de structures cérébrales et perturber le mouvement et la précision des gestes".
La maladie de Parkinson n'est pas la seule pathologie neurologique qui peut causer des tremblements incontrôlables. Les tremblements essentiels – sans aucun lien avec cette dernière – sont un trouble du système nerveux qui provoque des mouvements anormaux rythmiques concernant la plupart du temps les mains, mais peuvent aussi toucher la tête, le menton, le cou, la voix, les bras ou les jambes.
La cause en est inconnue mais un facteur génétique est soupçonné: "C'est une maladie familiale", précise la chercheuse.
Un faisceau convergent d'ultrasons
Le traitement prend place dans une salle d'examen IRM et dure quelques heures. La personne malade, immobilisée, porte un casque comportant 1024 sources émettant des faisceaux convergents d'ultrasons focalisés à haute intensité vers un point stratégique du cerveau profond, dans le thalamus.
"La température du tissu va augmenter; ce qui est très intéressant avec cette technique, c'est qu'on peut la contrôler. A des températures basses, en dessous de 40 degrés, cela ne va pas entraîner de lésions".
En augmentant la température vers les 50 degrés, les médecins vont obtenir un effet thérapeutique transitoire: "Cela va nous permettre d'apprécier si on est efficace ou si l'on entraîne des effets délétères. Quand on est sûr d'être au bon endroit, on va chauffer suffisamment fort pour induire une sorte de petite brûlure et faire une lésion de quelques millimètres". Ce sont uniquement les cellules génératrices du tremblement qui sont tuées de manière contrôlée.
De bons résultats à long terme
Les résultats sur les symptômes sont immédiats et très bons, surtout dans le tremblement essentiel: "Il y a une amélioration de l'amplitude du tremblement entre 50 et 80%. Et une augmentation de la qualité de vie d'environ 60% sur le long terme", remarque Vanessa Fleury. L'état de la personne malade se stabilise entre six mois et une année.
La physiopathologie de la maladie de Parkinson est différente et plus complexe: "Actuellement, la cible est encore en discussion. Souvent, on ciblait le thalamus, comme dans le tremblement essentiel, mais, hélas, dans le Parkinson les tremblements récidivent de façon assez fréquente", précise la médecin, notant que la nouvelle cible pourrait être le noyau sous-thalamique.
Sujet radio: Bastien Confino
Article web: Stéphanie Jaquet
Les médicaments en premier
A noter encore que 7% de la population ne peut pas bénéficier de ce type de technique, ayant le crâne trop épais pour que les ultrasons atteignent le point focal avec la température requise. Les autres contre-indications principales sont des saignements lors d'anévrismes artériel ou cérébral, par exemple, tout comme des pathologies touchant à la coagulation.
Avant de bénéficier de cette procédure, les personnes atteintes de tremblements doivent avoir épuisé les autres options: "Ce n'est pas une technique anodine, on fait tout de même une petite brûlure et on tue des cellules. On le fait uniquement si le tremblement est gênant et invalidant et qu'il n'a pas réagi aux traitements médicamenteux qui comportent moins de risques", affirme la neurologue Vanessa Fleury .