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"Non-événement", "trop cher": la fusion nucléaire ne fait pas l'unanimité

n technicien inspecte le réacteur de fusion du Lawrence Livermore National Laboratory aux États-Unis. [LAWRENCE LIVERMORE NATIONAL LABORATORY]
Un technicien ajuste une optique à l'intérieur de la structure de support du préamplificateur - [LAWRENCE LIVERMORE NATIONAL LABORATORY]
Le gouvernement américain a annoncé mardi une "avancée scientifique majeure" dans le domaine de la fusion nucléaire, considérée comme une future alternative possible aux centrales actuelles. Mais cette nouvelle ne convainc pas l'ensemble du milieu scientifique. Réactions.

La fusion nucléaire pourrait en 2070 révolutionner la production d'énergie sur Terre, sans rejet de CO2 ni de déchets radioactifs. Des chercheurs du laboratoire Lawrence Livermore, en Californie, sont pour la première fois parvenus à produire davantage d'énergie que la quantité utilisée pour provoquer cette réaction.

Jacques Dubochet pas convaincu

Mais cette avancée qualifiée par beaucoup d'historique ne convainc pas le Prix Nobel de chimie 2017, Jacques Dubochet, interrogé mercredi dans La Matinale.

Selon lui, cette technique arrive trop tard et est bien trop coûteuse. "L'idée d'utiliser la même méthode que pour produire de l'énergie solaire est certes attirante, mais cela coûte très cher et c'est extrêmement compliqué à mettre en place. Le soleil est ce qui nous chauffe. Il est la manière la moins coûteuse d'obtenir de l'énergie. On a donc les moyens immédiats d'avoir autant d'énergie que l'on souhaite."

>> L'interview de Jacques Dubochet dans La Matinale :

Jacques Dubochet [Keystone - Jean-Christophe Bott]Keystone - Jean-Christophe Bott
Fusion nucléaire: réaction Jacques Dubochet / La Matinale / 1 min. / le 14 décembre 2022

Martine Rebetez, professeure à l'Université de Neuchâtel et à l'Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage, est également sceptique. Si la promesse est séduisante, elle estime qu'elle est en revanche trompeuse. "Ce qui me frappe est que c'est pour 2070. Or, ça fait cinquante ans qu'on nous promet cette technologie. Pour moi c'est un non-événement".

"On n'avance pas assez vite"

Par ailleurs, du point de vue du changement climatique, on a besoin de solutions disponibles tout de suite. "Or, on en a déjà avec l'énergie solaire qui est tout à fait mûre et qui fonctionne en combinaison avec l'énergie des barrages. Le problème est qu'on n'avance pas assez vite. Il y a assez de techniques disponibles à ce jour."

>> L'interview de Martine Rebetez dans La Matinale :

Martine Rebetez, climatologue. [RTS - La Matinale]RTS - La Matinale
Les Etats-Unis annoncent avoir réussi une première fusion nucléaire. Interview de Martine Rebetez / La Matinale / 1 min. / le 14 décembre 2022

Pour Ambrogio Fasoli, directeur du Swiss Plasma Center de l'EPFL, invité mardi dans le 19h30, cette nouvelle revêt tout de même un caractère historique. "C'est la première fois sur Terre qu'on obtient plus d'énergie à partir de la fusion que ce qu'on injecte". 

Pour le physicien Yves Martin adjoint du directeur du Swiss Plasma Center de l'EPFL, interrogé mardi dans Forum, il s'agit d'un "pas supplémentaire pour aller vers la production d'énergie".

Soixante ans de recherche

La recherche autour de l'allumage par fusion dure depuis environ soixante ans et la théorie dit depuis un siècle qu'elle est possible. Mais pour qu'elle aboutisse vraiment, "cela pourrait encore prendre vingt ou trente ans", a estimé Erik Lefebvre, chef de projet des expériences laser au Commissariat à l'énergie atomique français.

D'autres projets de fusion nucléaire sont en développement, notamment le projet international ITER, actuellement en construction en France. Au lieu de lasers, la technique dite de confinement magnétique sera utilisée: les atomes d'hydrogène seront chauffés dans un immense réacteur, où ils seront confinés à l'aide du champ magnétique d'aimants.

>> Plus d'informations : La fusion nucléaire réussie pour la première fois aux Etats-Unis

Propos recueillis par Natacha Van Cutsem, Esther Coquoz, Philippe Revaz

Texte: Hélène Krähenbühl

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