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La station de ski autrichienne de Kitzsteinhorn mise sur la durabilité

Les stations de ski autrichiennes peuvent rester ouvertes depuis le 24 décembre, avec des mesures de sécurité très sévères. [afp - Stringer]
Un modèle de station de montagne plus durable en Autriche / Tout un monde / 5 min. / le 28 février 2023
A l'heure des faibles précipitations et des températures élevées en hiver, l'enneigement artificiel et l'impact environnemental des pistes de ski suscitent la controverse. A l'ouest de l'Autriche, dans la région de Zell am See-Kaprun, une station veut montrer qu’un modèle plus durable est possible.

Avec son glacier qui culmine à plus de 3000 mètres d’altitude, ses télécabines bondées et ses pistes enneigées, la station de Kitzsteinhorn ressemble à beaucoup d’autres. Elle souhaite pourtant se démarquer et proposer un modèle plus durable.

"Ici, nous constatons déjà les effets du réchauffement climatique, notre glacier rétrécit. Il est donc important pour nous de lutter contre cela", explique son directeur Norbert Karlsböck. "Tous les moteurs de nos remontées mécaniques fonctionnent ainsi avec de l’électricité issue des énergies renouvelables. Pour réduire davantage encore nos émissions de CO2, nous utilisons un biocarburant HVO pour nos dameuses. Enfin, nos technologies pour l'enneigement et la préparation des pistes sont aujourd'hui, pour l’essentiel, numérisées. Cela nous permet d’observer très précisément où il a neigé et en quelle quantité afin de ne produire que le strict nécessaire."

Mobilité repensée

Une terrasse panoramique au sommet du Kitzsteinhorn, à 3029 mètres d'altitude, offre une vue imprenable sur les montagnes du Land de Salzburg... quand le ciel est dégagé. [REUTERS - LEONHARD FOEGER]
Une terrasse panoramique au sommet du Kitzsteinhorn, à 3029 mètres d'altitude, offre une vue imprenable sur les montagnes du Land de Salzburg... quand le ciel est dégagé. [REUTERS - LEONHARD FOEGER]

Point crucial: les transports, principale source d’émission de C02 lors des séjours au ski, selon des experts. La station de Kitzsteinhorn est située à une dizaine de kilomètres de la gare de Zell am See, depuis laquelle partent des bus réguliers, qui amènent les skieurs jusqu’au pied des pistes. Le trajet est même gratuit s’ils possèdent un forfait de ski.

Certains ont donc fait le choix d'opter pour un voyage en train et de circuler uniquement en bus pendant leurs vacances. "Je suis venu en train depuis les Pays-Bas, j’ai mis environ 12 heures pour arriver à Zell am See", raconte un touriste. "Ensuite, c’est simple, vous pouvez prendre le bus à peu près n'importe où. Ils sont bondés, mais c’est très facile! Je pense que prendre des trains et des bus plutôt que sa voiture, c’est l’avenir, surtout dans ce genre de lieu. J’espère que cela arrivera aussi dans d’autres pays."

"Je trouve que c'est une très bonne idée, car c’est plus simple", abonde un autre visiteur. "On a juste à prendre ses affaires et monter dans le bus, sans avoir à penser à autre chose comme acheter une vignette pour la voiture. Je pense même que c’est moins cher. Et cela permet de transporter beaucoup de monde au lieu d'une seule personne par voiture, c'est donc beaucoup plus efficace."

"Je trouve super d’essayer de changer les choses"

Si de nombreux skieurs rencontrés sur les pistes semblaient ignorer les efforts de la station pour promouvoir un modèle plus durable, la plupart affirment que les préoccupations écologiques sont devenues importantes pour eux dans leur pratique du ski.

"La protection du climat est quelque chose d’essentiel", déclare un skieur. "Je pense que mes petits-enfants ne connaîtront le ski que par les histoires que je leur raconterai. Je me sens un peu coupable de cela. Je trouve donc que c’est une bonne idée qu’ils essaient ici de changer de modèle pour moins abîmer la planète. Je trouve super d’essayer de changer les choses."

"Nous sommes là à 1600 mètres d’altitude et il fait 10 degrés, à une période qui est d’ordinaire la plus froide de l’année", observe un homme. "C’est anormalement chaud! Protéger nos glaciers est d’une importance capitale. Nous nous devons d’agir avec tous les moyens à notre disposition et trouver un nouveau modèle, plus écologique, pour le ski."

"En Autriche, même quand il n’y a pas de neige, les gens veulent aller skier, car les Autrichiens sont attachés à leurs sports d'hiver", note une visiteuse. "Bien sûr, ce n’est pas bon pour le tourisme si personne ne vient, mais je trouve qu’on pourrait adopter une approche différente, je suis persuadée qu’on peut faire beaucoup plus."

Alternatives sur le long terme

Le sommet du Kitzsteinhorn lors de l'été très chaud de 2018. [KEYSTONE - EPA/CHRISTIAN BRUNA]
Le sommet du Kitzsteinhorn lors de l'été très chaud de 2018. [KEYSTONE - EPA/CHRISTIAN BRUNA]

Les efforts de la station de Kitzsteinhorn sont salués par les experts, à l'image d'Oliver Fritz, de l'Institut autrichien de recherche économique (WIFO). Mais il faut aussi, selon lui, penser à plus long terme. En effet, selon l'institut de météorologie autrichien, le réchauffement climatique a réduit la durée annuelle d'enneigement dans le pays de 40 jours en moyenne depuis 1961. Et celle-ci va, à l’avenir, encore diminuer.

Selon Oliver Fritz, il faut prendre en compte cette donnée. "Une région comme celle-ci vit en partie de son glacier, ici le Kitzsteinhorn. Or, il est appelé à disparaître tôt ou tard, la station de ski ne sera alors plus du tout la même. Nous devons nous demander à quoi ressemblera le tourisme dans un monde marqué par le changement climatique, y réfléchir en profondeur, et penser à de possibles alternatives aux activités touristiques auxquelles nous sommes habitués comme le ski alpin ou le ski de fond. Il reste donc beaucoup à faire. Je pense qu’il faut davantage d’efforts pour avoir un tourisme durable à l’avenir", analyse l'économiste.

L’enjeu est aussi économique pour l’Autriche, où le tourisme représente 7,5% du PIB et 330'000 emplois à temps plein. L'avenir de la glisse préoccupe en particulier le pays alpin, deuxième destination mondiale derrière les Etats-Unis en termes de fréquentation moyenne des skieurs.

Reportage radio: Isaure Hiace

Adaptation web: ami

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