C’est un joyau technologique suisse qui aujourd'hui gît dans la vase. L’ancien Planet Solar, premier bateau à avoir accompli un tour du monde à l’énergie solaire en 2010, est échoué depuis 5 mois dans un terrain vague du port de Mumbai, en Inde.
Sur des vidéos censées rester privées, mais que la RTS s’est procurées, on y découvre le catamaran dans un piteux état. Il est dans la boue et les déchets, ses flotteurs sont éventrés.
Pourtant, en novembre 2022, les dernières nouvelles du bateau disaient qu’il avait repris la mer, en route vers une restauration dans un chantier naval.
La gloire, puis le naufrage
Il y a un an, le célèbre catamaran suisse était encore resplendissant. 30 mètres de long, 100 tonnes, 500 m2 de panneaux solaires sur le toit: un navire du futur.
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Fin 2020, Gunter Pauli, entrepreneur belge surnommé le "Steve Jobs du développement durable", le rachète pour 3,5 millions d’euros et le rebaptise Porrima. Le but: en faire une vitrine de promotion des énergies renouvelables, naviguant dans le monde entier. Le bateau est même élu ambassadeur de la future exposition universelle d’Osaka, en 2025.
Mais en août 2022, c’est le naufrage. Contre toute attente, Porrima s’échoue sur une plage de la côte ouest indienne, après une série d’avaries et sur fond de mutinerie contre le propriétaire. Interviewé à l’époque par le 19h30, Gunter Pauli se montrait optimiste: "Le bateau est en état extraordinaire. Je crois que pour février 2023, il aura retrouvé sa grandeur, là où on souhaite l’avoir."
Planet Solar, devenu bateau pirate
La grandeur, le catamaran, en est pourtant loin. Aujourd’hui, les réparations n’ont toujours pas commencé. Pire, notre enquête révèle que les autorités suisses ont décidé de lui retirer son pavillon helvétique. Une mesure généralement prise en ultime recours. Le navire est désormais interdit de navigation.
Contacté, le Département fédéral des affaires étrangères confirme à la RTS que "l’Office suisse de la navigation maritime" (OSNM) a rendu une décision de radiation du yacht Porrima du registre suisse des yachts. Cette décision n’est cependant pas encore entrée en force et peut encore faire l’objet d’un recours."
Le propriétaire relativise
Nous avons contacté Gunter Pauli. Il soutient que le bateau est en bon état, vu les circonstances, et il assure qu’il sera conduit dans un chantier naval d’ici fin avril. "Le bateau est entre les mains d’experts, nous avons une équipe extraordinaire du monde entier et grâce à cette équipe le bateau aura un grand futur".
Quant à la perte du pavillon suisse, elle est selon lui le résultat de son refus de conserver un moteur diesel à bord, pour des raisons écologiques. "Quand vous prenez cette décision, vous avez des conséquences. C’est que vous n’obtiendrez plus une classification du bateau. Pas de classe, pas d’assurance. Pas d’assurance, pas de pavillon." Et de relativiser cette issue en assurant qu’il n’a pas besoin de pavillon, puisque le bateau s’apprête à être en réparation pour minimum une année.
Difficile toutefois de savoir quand et si le célèbre catamaran retrouvera la mer. D’après nos informations, le sponsor principal du projet, le groupe industriel japonais Saraya, s’est retiré. Son président, Yusuke Saraya, nous l’a confirmé par email début mars. Il assure avoir investi plusieurs millions dans l’affaire. Une somme qu’il estime aujourd’hui perdue.
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Sujet TV: Flore Amos/Pôle enquête